Page:Aristote Metaphysique 1840 1.djvu/30

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moyen d’une argumentation vigoureuse et serrée : les Sophistes surtout sont attaqués sans relâche, et il sait habilement tourner leurs propres armes contre eux-mêmes. Tantôt il confronte les principes de ses prédécesseurs à ceux qu’il a lui-même établis, et s’attache à les convaincre d’impuissance et d’erreur. Mais ce n’est pas tout encore : il s’attaque à son propre système ; il le soumet à son analyse impitoyable ; il en expose les difficultés, les contradictions ; il le réduit en poudre, en quelque sorte ; et, lorsqu’il nous voit épuisés, hors d’haleine, lorsque nous désespérons presque de la vérité, au milieu des contradictions qui surgissent de toutes parts, il fait peu à peu apparaître la lumière ; tout se concilie ; l’ordre règne là où tout à l’heure nous ne voyions que désordre et chaos, et l’esprit se repose au sein d’une admirable harmonie.

Mais à quoi bon tant de peine ? pourquoi chercher la science à travers des chemins si tortueux ? C’est que rien ne peut mieux faire briller un système que cette confrontation perpétuelle avec les difficultés qu’il est appelé à résoudre. C’est beaucoup pour un principe d’être appuyé sur l’observation, en rapport avec l’expérience et la raison universelle ; mais c’est plus encore de rendre compte de toutes les difficultés. Il est, comme le dit Aristote, des méthodes diverses pour les esprits différents. Pour quelques-uns il suffira que les principes soient énoncés pour être admis ; d’autres, au contraire, demandent que tout soit rigoureusement démontré[1] ; ils ne se rendent aux principes, que si vous

  1. Liv. II, ch. 3.