Page:Aristote Metaphysique 1840 2.djvu/241

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était différent d’être pensé, lequel des deux constituerait l’excellence de la pensée ? Car la pensée et l’objet de la pensée n’ont pas la même essence. Ou bien la science est-elle dans certains cas la chose même ? Dans les sciences créatrices, l’essence indépendante de la matière et la forme déterminée, la notion et la pensée, dans les sciences théorétiques, sont l’objet même de la science. Pour les êtres immatériels, ce qui est pensé n’a pas une existence différente de ce qui pense, il y a identité, et la pensée ne fait qu’un avec ce qui est pensé.

Reste encore une difficulté ; c’est de savoir si l’objet de la pensée est composé, et dans ce cas l’intelligence changerait, car elle parcourrait les parties de l’ensemble ; ou bien si tout ce qui n’a pas de matière est indivisible. Il en est éternellement de la pensée, comme il en est de l’intelligence humaine, de toute intelligence dont les objets sont des composés, à quelques instants fugitifs. Car ce n’est pas toujours successivement que l’intelligence humaine saisit le bien ; c’est dans un instant indivisible qu’elle saisit son bien suprême. Mais son objet n’est pas elle-même ; tandis que la pensée éternelle, qui saisit aussi son objet dans un instant indivisible, se pense elle-même durant toute l’éternité.