Page:Aristote Metaphysique 1840 2.djvu/8

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forme déterminée[1], ou bien la qualité, la quantité, ou chacun des autres attributs de cette sorte. Mais parmi ces acceptions si nombreuses de l’être, il est une acception première ; et l’être premier c’est sans contredit la forme distinctive, c’est-à-dire l’essence. En effet, lorsque nous attribuons à un être telle ou telle qualité, nous disons qu’il est bon ou mauvais, etc., et non point qu’il a trois coudées ou que c’est un homme ; lorsque nous voulons au contraire exprimer sa nature, nous ne disons pas qu’il est blanc ou chaud, ni qu’il a trois coudées, mais nous disons que c’est un homme ou un dieu. Les autres choses ne sont appelées êtres, que parce qu’elles ont ou des quantités de l’être premier, ou des qualités, ou des modifications de cet être[2], ou quelque autre attribut de ce genre. On ne saurait donc décider si marcher, se bien porter, s’asseoir, sont, ou non, des êtres ; et de même pour tous les autres états analogues. Car aucun de ces modes n’a, par lui-même, une existence propre, aucun ne peut être séparé de la substance. Si ce sont là des êtres, à plus forte raison ce qui marche est un être, ainsi que ce qui est assis, et ce qui se porte bien. Mais ces choses ne semblent si fort marquées du caractère de l’être que parce qu’il y a sous chacune d’elles un être, un sujet déterminé. Et ce sujet, c’est

  1. Τί ἐστι ϰαὶ τόδε τι. « Le τόδε τι exprime l’objet immédiat de l’intuition, et par suite l’essence, l’être individuel par opposition à la qualité qui peut être l’objet d’une conception générale. » F. Ravaisson, Essai sur la Mét., t. I p. 381, en note.
  2. Τοῦ οὕτως ὄντος vulg. ὄντως ὄντος, expression plus platonicienne qu’aristotélique.