Page:Arnauld et Nicole - Logique de Port-Royal, Belin, 1878.djvu/284

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pourvu qu’on y employât une force égale au poids d’une colonne d’eau de plus de trente-trois pieds de haut, de la grosseur de la seringue, et qu’on ne saurait lever de l’eau par une pompe aspirante plus haut de trente-deux à trente-trois pieds[1].


CHAPITRE XX

Des mauvais raisonnements que l’on commet dans la vie civile et dans les discours ordinaires[2].


Voilà quelques exemples des fautes les plus communes que l’on commet en raisonnant dans les matières de sciences ; mais parce que le principal usage de la raison n’est pas dans ces sortes de sujets qui entrent peu dans la conduite de la vie, et dans lesquels même il est moins dangereux de se tromper, il serait sans doute beaucoup plus utile de considérer généralement ce qui engage les hommes dans les faux jugements qu’ils font en toute sorte de matière, et principalement en celle des mœurs et des autres choses qui sont importantes à la vie civile, et qui font le sujet ordinaire de leurs entretiens. Mais, parce que ce dessein demanderait un ouvrage à part qui comprendrait presque toute la morale, on se contentera de marquer ici en général une partie des causes de ces faux jugements, qui sont si communs parmi les hommes.

On ne s’est pas arrêté à distinguer les faux jugements des mauvais raisonnements, et on a recherché indifféremment les causes des uns et des autres ; tant parce que les faux jugements sont les sources des mauvais raisonnements, et les attirent par une suite nécessaire, que parce qu’en effet il y a presque toujours un raisonnement caché et enveloppé en ce qui nous paraît un jugement simple, y ayant toujours quelque chose qui sert de motif et de

  1. Les expériences de Torricelli et de Pascal ont mis cette vérité en lumière.
  2. Ce chapitre célèbre est très-probablement de Nicole.