Page:Arnauld et Nicole - Logique de Port-Royal, Belin, 1878.djvu/449

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considérée seule et non jointe à d’autres, puissent en être conclues, comme on peut le voir dans cette définition du cercle. Car on en conclut évidemment que toutes les lignes menées du centre à la circonférence sont égales ; il est si évident que c’est là une condition nécessaire de la définition, pour peu qu’on veuille y faire attention, que je crois inutile d’y insister et de le démontrer, et même de faire voir que par cette seconde condition toute définition doit être affirmative. Je parle de la définition intellectuelle, me souciant peu de la définition verbale, que la pénurie des mots m’obligera peut-être quelquefois d’exprimer sous forme négative, quoiqu’elle soit comprise affirmativement.

J’ai dit encore que la meilleure conclusion est celle qui se tire d’une conclusion particulière affirmative. Car plus une idée est spéciale, plus elle est distincte, et par suite, plus elle est claire. Nous devons donc le plus possible chercher la connaissance des choses particulières.

De l’ordre des idées.

Quant à l’ordre de nos perceptions, il faut, pour les ordonner et les lier, rechercher, autant que cela se peut et que la raison le demande, s’il y a quelque être (et en même temps quel il est) qui soit cause de toutes choses, de telle sorte que son essence objective soit aussi la cause de toutes nos idées ; et alors notre esprit, comme nous l’avons dit, reproduira le plus exactement possible la nature, car il en contiendra objectivement l’essence, l’ordre et l’union. D’où nous pouvons voir qu’il nous est tout à fait nécessaire de tirer toutes nos idées des choses physiques, c’est-à-dire des êtres réels, en allant, suivant la série des causes, d’un être réel à un autre être réel, sans passer aux choses abstraites et universelles, ni pour en conclure rien de réel, ni pour les conclure de quelque être réel ; car l’un et l’autre interrompent la marche véritable de l’entendement. Mais il faut remarquer que par la série des causes et des êtres réels je n’entends point ici la série des choses particulières et changeantes, mais seulement la série des choses fixes et éternelles. Car pour la série des choses particulières sujettes au changement, il serait impossible à la faiblesse humaine de l’atteindre, tant à cause de leur multitude innombrable qu’à cause des circonstances