Page:Arnauld et Nicole - Logique de Port-Royal, Belin, 1878.djvu/79

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHAPITRE VII

Des cinq sortes d’idées universelles, genres, espèces, différences, propres, accidents.


Ce que nous avons dit, dans les chapitres précédents, nous donne moyen de faire entendre en peu de paroles les cinq universaux qu’on explique ordinairement dans l’école[1].

Car lorsque les idées générales nous représentent leurs objets comme des choses, et qu’elles sont marquées par des termes appelés substantifs ou absolus, on les appelle genres ou espèces.

Du genre[2].

On les appelle genres quand elles sont tellement communes, qu’elles s’étendent à d’autres idées qui sont encore universelles, comme le quadrilatère est genre à l’égard du parallélogramme et du trapèze ; la substance est genre à l’égard de la substance étendue qu’on appelle corps, et de la substance qui pense qu’on appelle esprit.

De l’espèce.

Et ces idées communes, qui sont sous une plus commune et plus générale, s’appellent espèces ; comme le parallélogramme et le trapèze sont les espèces du quadrilatère, le corps et l’esprit sont les espèces de la substance.

Et ainsi la même idée peut être genre, étant compa-

  1. Porphyre, philosophe néoplatonicien d’Alexandrie (233-305 ap. J.-C.) avait écrit une Introduction aux Catégories d’Aristote. Il y définit les termes universels ou universaux, et se demande s’ils existent seulement dans la pensée ou s’ils existent aussi dans les choses sensibles : χωριστὰ τὰ γίνη ἢ ὲν τοἲς αὶσθητοἲς ; c’est la question qui donna lieu à la querelle des nominalistes et des réalistes.
  2. « Le genre, dit Bossuet, est ce qui convient à plusieurs choses différentes en espèce, comme l’espèce est ce qui convient à plusieurs choses différentes seulement en nombre. » (Log., livre Ier, chap. XLV.)