Page:Arnould - Quelques poètes, 1907.djvu/174

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la belle saison invite
chacun au plaisir d’aimer :
la jeunesse de l’année
soudain se voit terminée ;
après le chaud véhément
revient l’extrême froidure,
et rien au monde ne dure
qu’un éternel changement.

Leurs courses entresuivies
vont comme un flux et reflux ;
mais le printemps de nos vies
passe et ne retourne plus.
Tout le soin des destinées
est de guider nos journées
pas à pas vers le tombeau !
Le Temps de sa faux moissonne,
et sans respecter personne,
ce que l’homme a de plus beau.

Tes louanges immortelles,
ni tes aimables appas,
qui te font chérir des belles,
ne t’en garantiront pas.
Crois-moi, tant que Dieu t’octroie
cet âge comblé de joie
qui s’enfuit de jour en jour,
jouis du temps qu’il te donne,
et ne crois pas en automne
cueillir les fruits de l’amour.

Dans cette pièce au rythme léger l’on reconnaît tout le gracieux épicurisme de l’école de Ronsard, avec une tenue plus ferme en bien des accents. C’est là ce qu’on peut appeler l’angevinisme de notre poète, en prenant le terme dans un sens très large, pour désigner cette combinaison délicate d’influences qui lui arrivaient, mêlées, du Maine,