Page:Arnould - Quelques poètes, 1907.djvu/175

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du Vendômois et de l’Anjou : c’est bien là, si l’on me permet de forger un mot, le champmarinisme de Racan.

À cette conclusion littéraire doit se joindre enfin une conclusion pratique. L’habitude nous rend le mauvais service de nous accoutumer trop aux personnes et aux lieux qui nous sont familiers, et la routine engendre l’indifférence et presque l’inconscience. Ainsi, chacun dans notre village, nous nous habituons à coudoyer, pour ainsi dire, des maisons, dont les pierres froides ne nous disent plus rien, sans songer à tous les drames qu’elles ont contenus, drames de joie, surtout de douleur, et je veux simplement parler des existences successives qu’elles ont enfermées, car toute existence humaine n’est-elle point une sorte de drame ? Et comment pourrions-nous y penser, comment tirerions-nous de cet élément quotidien de notre vie un degré quelconque d’intérêt, si nous ne savons aucun détail particulier, précis, intime, et si nous sommes réduits à nous intéresser vaguement à « un mur derrière lequel il a dû se passer quelque chose » ? La plupart de nos villages français se composent de quelques maisons qui remontent au moyen âge ou au 16e siècle, d’un grand nombre du 17e ou du 18e : celles que l’on appelle les neuves ont, la plupart, plus d’un demi-siècle d’existence. Eh bien ! nous autres chercheurs, nous ne nous attachons pas assez à retrouver l’histoire, la vie de