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Page:Arnould - Quelques poètes, 1907.djvu/183

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Cependant les Espagnols ont envahi le nord de la France. Louis de Bueil court se mettre au service d’Henri IV sous les murs d’Amiens. Nommé par le roi grand maître de l’artillerie, il s’équipe avec magnificence ; mais, avant l’ouverture des tranchées, il meurt soudainement.

Cinq années après, la mère de Racan, usée par le chagrin, par les difficultés financières qui grevaient la succession de son mari, disparaît à son tour, et l’enfant de treize ans, deux fois orphelin, est confié à son cousin le comte de Bellegarde, Grand Ecuyer de France, qui accepte sa tutelle et le place comme page dans la Chambre d’Henri IV.

Alors le jeune homme passe six ans à la cour, où battait son plein cette brillante fête de jeunesse conduite par le roi en personne, malgré sa barbe grise ; foyer épicurien, de mœurs extrêmement faciles, au point que le page dut accompagner plus d’une fois le Vert-Galant dans ses équipées nocturnes en quelque coin de sa bonne ville.

Il montra du goût pour la seule instruction qui fût donnée aux pages : ceux-ci avaient en tout un maître de mathématiques, chargé de leur en apprendre les quatre parties d’alors : l’arithmétique, la géométrie, l’astronomie et la musique ; cas qui n’est point fréquent, d’un jeune poète qui montre de la prédilection pour les sciences : chez le nôtre, ce goût ne sera sûrement pas étranger à la netteté de sa pensée et à la clarté de son style.