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Page:Arnould - Quelques poètes, 1907.djvu/240

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QUELQUES POÈTES

En dépit de tous ces emprunts, l’on voit ici, plus facilement encore qu’avec Horace, puisque la similitude est plus complète, comment chaque poète a mis sa personnalité dans ses Stances.

Les premières stances de Desportes sur la vie de cour ne manquent pas d’une certaine fermeté, mais la rhétorique n’en est point absente. L’auteur peint les inconvénients de la faveur en homme qui en a bien joui toute sa vie et qui est pourvu de quatre bonnes abbayes. Il a pour la fortune le mépris tout artificiel et tout poétique de celui qui a été gâté par elle ; nous sommes loin du renoncement douloureux de Racan qui, l’ayant poursuivie en vain, lui dit adieu non sans souffrance.

Là où Desportes est plus personnel, c’est quand il décrit sa vie à la campagne, ce far-niente élégamment sensuel avec ses plaisirs variés, ses amours faciles, et surtout ses rêveries de nuit parmi les danses de Nymphes au clair de lune. Mais on sent bien que le cœur de l’homme n’est pas pris par les véritables charmes de la campagne, c’est seulement l’imagination du poète rêveur qui est touchée.

Chacun d’eux évidemment aime la campagne à sa manière. Mais comme celle de Racan est plus forte, plus saine, plus élevée ! Ce qu’il aime dans la campagne, ce ne sont pas les attraits épicuriens qu’elle offre aux sens, ni le noctambulisme