Page:Asselin - Pensée française, pages choisies, 1937.djvu/42

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

LE DRAPEAU ROUGE



LA police de Montréal serait-elle justifiable d’empêcher le déploiement du drapeau rouge ? Telle est la question que M. Baillargé pose dans la Patrie sur ce ton alarmiste dont il a le secret.

Certains drapeaux ont une signification reconnue par les gouvernements et acceptée de tout le monde civilisé. Il n’en est pas ainsi de l’emblème qui effraie M. le curé de Saint-Hubert : n’importe qui peut s’en servir pour exprimer n’importe quoi : à tel point que s’il prenait fantaisie à M. Baillargé de l’arborer dans une procession de la Fête-Dieu, la chose semblerait aussi logique que d’en faire le signe de ralliement d’un parti politique. On ne peut donc pas plus le supprimer par des décrets et des ordonnances qu’on ne peut préciser dans un texte de loi le sens du mot « socialisme » avec lequel on a accoutumé de l’identifier et qui, selon la manière dont il s’entend, peut édifier ou scandaliser M. le curé de Saint-Hubert.

L’anarchie tend aujourd’hui à délaisser le rouge pour le noir : c’est donc celui-ci qu’il faudra proscrire si l’on admet qu’une couleur devienne odieuse parce qu’un groupe ou un clan suspect cherche à la monopoliser. Et le noir disparu, comment fera-t-on pour exprimer son deuil ? M. le curé de Saint-