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PENSÉE FRANÇAISE

églises et je serai cité en exemple au menu fretin du haut des chaires de vérité.

Quant à vous, sorti à moitié du journalisme, vous goûtez à la Patrie la protection du seul vrai Mécène que possèdent à l’heure actuelle les Lettres canadiennes-françaises : je veux dire M. Louis-Joseph Tarte, et je parle ici sérieusement, pour avoir moi-même passé à la Patrie la plus douce année de mon existence. Mais tant que vous tiendrez, de si loin que ce soit, à ce damné métier, vous ne pourrez vous empêcher de faire des fredaines, vous conserverez la démangeaison d’écrire des ouvrages comme celui-ci pour dénigrer tout ce que vénèrent nos compatriotes : les magistrats, les geôliers, les gardes, les prisons. Je vous ai fait, dans le passé, beaucoup de tort par mes mauvais exemples. Ma conscience ne me donnera de cesse que je ne vous aie, par de paternels conseils, arraché à l’existence de propre-à-rien où je sens que j’ai pu contribuer à vous conduire. Sortez du journalisme ; mettez-vous dans l’Immeuble. J’ajouterai une parole qui aura son écho dans les siècles futurs, sur laquelle les historiens de l’avenir se chamailleront sans répit et que la moitié de l’humanité jettera en opprobre à ma mémoire ; mais une parole que mon bonheur présent me fait un devoir de vous crier des profondeurs de mon âme… si la prison m’en a laissé une : Mentez, mentez, il vous en restera toujours quelque chose.

Après cela, voulez-vous que je vous dise ? je ne suis pas assez naïf pour croire que vous m’écoutiez… Vous resterez dans le journalisme, vous publierez vos Souvenirs, vous passerez encore par la justice de François Langelier (celui qui, au dire de son frère Charles, organisait avec le futur juge Lemieux les grandes bagarres électorales de 1886), et vous retournerez chez M. Morin[1]. Et comme vous n’êtes ni Gaynor ni Greene,

  1. Gouverneur de la prison.