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PENSÉE FRANÇAISE

rez dédaigneusement le nez sur le skelley et sur la jambe de botte, et c’est d’un ventre ferme que vous irez vous vautrer dans les pissenlits en fleurs du préau, pendant que Madame de Saint-André vous criera de sa voix d’honnête femme, à travers les barreaux du quatrième : « Bonjour Monsieur Asselin ! Bonjour Monsieur Fournier ! »

Ce rêve d’entérocolite, pour peu que vous l’ayez préparée par plusieurs années de très peu d’argent et de beaucoup de misère, vous vous en assurerez en passant préalablement deux jours dans les cellules de la police provinciale, au rez-de-chaussée du Parlement. (Vous savez en effet aussi bien que moi que la Province a jugé prudent d’installer sa police sous le même toit que ses législateurs, et que ce n’est pas sa faute si les agents qui devaient tenir l’abitibisme en respect sont devenus les instruments des basses œuvres de M. Charles Lanctot.) Il faut, bien entendu, savoir choisir sa cellule. Prenez celles des femmes, à droite en entrant. Elle a huit pieds sur six. Il y entre du froid par la fenêtre grillagée. (Et la garde qui veille aux barrières du Louvre…). Elle est basse ; elle est humide ; on y est à ravir pour attraper des affections enté… (voir plus haut).

« Mais, mon cher Asselin, direz-vous, n’entre pas là qui veut ; ce n’est pas tout le monde qui peut faire deux jours de cachot avant d’être, dans le langage des greffiers, admis à caution. Avouez que vous avez fait du luxe. »

Je vous l’accorde, mon cher Fournier ; non cependant sans vous faire observer qu’en cherchant bien, dans la province de Québec, sous le règne glorieux du gouinisme, on finit toujours par trouver un juge assez consciencieux pour s’inspirer, dans ses jugements, non de la Loi, qui varie suivant l’intérêt du législateur ; non de la Jurisprudence, qui n’est en somme que la fan-