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Edgar Poë.

teur d’une Revue de Londres, examinant les dernières productions de la poéſie anglaiſe, reconnaiſſait Baudelaire comme un chef d’école dont l’influence s’était fait ſentir même en dehors de ſon pays.

Dans ce travail conſidérable, puiſque l’ouvrage entier comprend cinq volumes de texte compacte, Baudelaire a donné la meſure de ſa puiſſance d’application & de ſa pénétration d’eſprit ; il a auſſi livré ſa méthode. J’ai déjà ſignalé ailleurs, en parlant de Gérard de Nerval, l’habitude ſystématique chez de certains écrivains, de colporter leurs ſujets, de les cauſer, de les cuire, ſi je puis ainſi parler, à tous les fours, en les ſoumettant au jugement des grands & des petits, des lettrés & des naïfs. Cette méthode était auſſi celle de Baudelaire ; & c’eſt ce qui explique à la fois le petit nombre & l’excellence de ſes ouvrages. Baudelaire travaillait en dandy[1]. Nul ne fut

  1. Ce mot de dandy, Baudelaire l’employait fréquemment dans ſa converſation & dans ſes écrits, en le prenant dans un ſens particulier, — héroïque & grandioſe. Le dandy était à ſes yeux l’homme parfait, ſouverainement indépendant, ne relevant que de lui-même, & régnant ſur le monde en le dédaignant. L’écrivain-dandy était celui qui mépriſe l’opinion commune & ne s’attache qu’au beau, & encore ſelon ſa conception particulière. Le mot revient ſouvent dans les notes manuscrites dont j’ai déjà cité quelques lignes. En tête d’une page, je