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le livre
À un Amant
Amant abandonné qu’une maitreſſe oublie,
Pourquoi ce poing fermé que tu montres aux cieux ?
Pourquoi ce pli profond dans ton front ſoucieux
Et ce regard où brûle une ardeur de folie ?
Pourquoi ce déſeſpoir ? Parce qu’elle eſt jolie,
Parce qu’en careſſant ſon corps délicieux,
En reſpirant ſa bouche, en admirant ſes yeux,
Tu trouvais un remède à ta mélancolie !
Tu pâlis en ſongeant à l’odeur de ſa chair ;
Son vif âge eſt toujours le ſeul qui te ſoit cher :
De tout autre, auſſitôt blaſé, tu te dégoûtes.
Va ! tu me fais pitié, triſte martyr d’amour.
La vie eſt un éclair, la beauté dure un jour !
Songe aux têtes de morts qui ſe reſſemblent toutes.
François Coppée.