Page:Assollant - Aventures merveilleuses mais authentiques du capitaine Corcoran, II.djvu/158

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— Je m’en doute, répondit l’autre.

— Vous savez à quel prix vous pouvez sauver votre vie et même votre liberté ?

— Je le sais. Pendez-moi.

— Je suis fâché, dit Corcoran, que vous ayez consenti à faire un pareil métier, car vous êtes un brave.

— Peuh ! dit Doubleface, on fait le métier qu’on peut. Si j’étais né fils aîné de lord, je serais général d’armée, gouverneur de l’Inde, de Gibraltar ou du Canada ; je dirais en public des choses dénuées de sens, et je serais applaudi comme un politique de la plus haute volée ; je chasserais le renard avec tous les gentlemen du comté ; je présiderais tous les banquets, je porterais des toasts à toutes les dames. Mais le sort ne l’a pas voulu. Personne n’a connu mon père. Ma mère m’a élevé, Dieu sait comment, dans les rues de Londres. À dix ans, j’ai été embarqué comme mousse sur un navire qui allait chercher du café et du sucre à l’île Maurice ; j’ai fait cinq ou six fois le tour du monde, j’ai appris sept ou huit langues sauvages, et enfin, à bout de tout, ne sachant que faire pour devenir un gentleman, je suis devenu chef de la police à Calcutta. Lord Braddock m’a offert cette mission, je l’ai acceptée. Je savais que je courais le risque d’être pendu ; j’ai joué la partie, je l’ai perdue. Faites ce qu’il vous plaira. Quant à trahir