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porter une lettre dans laquelle il lui disait : Je vois la colère de Dieu qui s’apprête à fondre sur vous ; cessez donc de persécuter les chrétiens, de peur que la colère de Dieu ne vous atteigne, car elle est près d’éclater sur votre tête. Balacius se moqua de cet avertissement, jeta la lettre par terre en crachant dessus, outragea ceux qui l’avaient apportée et leur enjoignit de dire à Antoine : Puisque tu t’intéresses aux moines, je vais aussi m’adresser à toi. Cinq jours n’étaient pas encore écoulés que la colère de Dieu tombait sur Balacius ; il était sorti d’Alexandrie avec Nestorius, lieutenant d’Égypte, pour se rendre à la première station, appelée station de Chéréas ; tous deux étaient à cheval, les deux chevaux appartenaient à Balacius et étaient les plus doux de ceux qu’il avait dans ses écuries. Ils n’étaient pas encore arrivés au but de leur voyage, lorsque les deux chevaux se mirent, comme ces animaux ont coutume de faire, à jouer ensemble. Tout à coup le cheval sur lequel Nestorius était monté (c’était le plus doux des deux) mordit Balacius, le renversa et se jeta sur lui ; il lui déchira si horriblement la cuisse qu’il fallut sur-le-champ le transporter à la ville, où il mourut au bout de trois jours, et tout le monde admira un si prompt accomplissement des prédictions d’Antoine.

Tels étaient les avis qu’il donnait à ceux qui se conduisaient avec inhumanité. Quant à ceux qui venaient le trouver, il leur donnait de si sages conseils qu’on enviait le bonheur de ceux qui abandonnaient le monde pour la solitude. Il mettait un si grand zèle à défendre les opprimés qu’on eût pensé que c’était lui-même qui souffrait l’injustice et non les autres. Il semblait être un médecin donné par Dieu à toute l’Égypte. Quel affligé vint le trouver sans s’en retourner la joie dans le cœur ? Vint-il un homme pleurant la mort de ceux qui lui étaient chers sans déposer aussitôt son deuil ? Vint-il un homme irrité contre son adversaire sans se réconcilier avec lui ? Vint-il un seul malheureux désolé