Page:Aubert - Américains et Japonais, 1908.pdf/82

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j’y étais, je ne faisais jamais ma pleine journée de travail. Nous avions l’habitude de nous asseoir en rond et de regarder les Japs travailler. Beaucoup en arrivent à ne pas même amorcer le travail. Et puis, un beau jour, ils s’aperçoivent qu’ils ont dressé des mécaniciens qui les valent. »

Aux États-Unis, tout manœuvre, sitôt qu’il s’américanise, devient une manière d’aristocrate : il se sait gré que de la masse des prolétaires faméliques d’Europe, une immigration volontaire et courageuse l’ait sélectionné. Dans les meetings politiques, dans les séances des trade-unions, il s’entend dire que lui, citoyen américain, a le droit et le devoir d’être fier, que ses salaires continuent de monter, doubles ou triples des salaires d’Europe, que le tarif est là pour les maintenir et qu’en somme son standard of living est envié par les prolétaires de tous les pays. Aux Hawaï, ces manières d’aristocrates s’exagèrent encore : si la concurrence des Orientaux diminue le nombre des ouvriers d’Occident, elle tend par contre à élever leurs salaires. Des Blancs sont nécessaires dans toute entreprise qui exige une certaine invention ou habileté technique. Il faut les retenir dans les îles par de hautes payes qui compensent le coût de la vie, l’isolement, et l’aversion dont tous témoignent de travailler avec des Asiatiques. Un surveillant rapporte qu’il payait 2,50 dollars par jour à des marins blancs une tâche de débardeurs : ils quittèrent la place pour des emplois inférieurs, sous prétexte qu’ils ne voulaient pas d’un travail qui les associait à des Japonais. Aux yeux de ces Blancs, l’Asiatique abaisse et souille le métier qu’il exerce. Parfois, les Blancs sont des aventuriers que des vaisseaux de toutes les parties