sia, s’il n’a pas perdu sa santé, a perdu le peu de gaieté qui lui restait. Ce n’est pas la Tensia du lit de parade qu’il regrette. Celle-là s’est vite effacée de sa mémoire. C’est l’autre, celle qui est partie un jour, dansant, riant et chantant, et qui ne reviendra plus jamais, jamais, ainsi que l’a dit Christine.
Maintenant surtout que l’enfant n’est plus là pour éclairer les heures sombres, il se laisse aller tout entier à sa peine, et même à son ressentiment. Ce ressentiment devient parfois si violent qu’il ne peut le cacher. Il répète, à l’adresse de Tensia, et sans rien y changer, le reproche d’hier et des jours passés :
« Pourquoi n’a-t-elle pas suivi le droit chemin ? Être aimée de son mari et de son enfant, que faut-il de plus à une femme ? » Et, comme s’il venait de soulever un poids trop lourd pour sa force, il s’assied et revient à cet état morne et comme assommé, plus pénible à supporter pour Églantine que ses reproches et ses accès de colère.
À l’inverse de lui, Églantine continue de souffrir en silence. Jamais encore elle n’a laissé échapper un mot de son secret. Il lui est même impossible de parler de son pays ; et s’il lui arrive de vouloir le faire,