Page:Audoux - Douce Lumiere.djvu/30

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avait fondu, et que le soleil s’ouvrait un grand passage à travers les nuages.

Ils redescendirent. Ils avaient faim. Midi était loin déjà. Du pain, du fromage et quelques fruits, et tous deux, oubliant le mauvais temps du matin, sautèrent une fois de plus la grille et s’en allèrent vers l’étang. Il était à pleins bords, aujourd’hui, et seuls les grands roseaux des rives se montraient au-dessus de l’eau. Jamais Douce ne l’avait vu si plein, et tout de suite elle pensa qu’il devait être ainsi le jour où son père s’y était noyé. Et tout de suite aussi elle revit le cadre doré et les prunelles sombres du jeune marié.

Le soleil brillait maintenant et faisait briller les gouttes de pluie qui restaient accrochées aux herbes et aux aiguilles de sapins. Il y avait dans l’air une douceur, comme au printemps. De temps en temps on entendait un coup de feu au loin. Et Douce, qui s’était tout d’abord inquiétée de la venue d’un chasseur, avait été rassurée par Noël :

— Cette sapinière est à nous. Papa seul a le droit d’y chasser. Il sait que je viens pêcher ici et il prendrait bien garde.

Tout en parlant, il préparait les lignes apportées le matin et déposées dans une