Page:Audoux - Douce Lumiere.djvu/68

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comme pour approuver ses paroles. Elle lui passait la main sur le museau, à rebrousse poil, selon son habitude, et chaque fois sa main rencontrait la langue chaude et caressante du chien. Cependant ce n’était pas celui qui était là qu’elle voyait. Et ses yeux, largement ouverts dans son visage mince, montrèrent un regard comme perdu lorsqu’elle dit :

— Petite boule noire, cher petit frère Tou, comme vous avez mis longtemps à grandir avec si peu de nourriture. Mais, grand Dieu ! comme vous m’aimiez ! Et comme je vous aimais !

Ah ! la bonne causerie de ce beau dimanche de juin. Ce qui venait d’être dit rapprochait encore ces êtres qui s’aimaient jusqu’à l’extrême. Ils firent silence. Et dans le propre silence des choses, ce fut comme s’ils étaient séparés du monde entier. Auprès d’eux les roseaux de l’étang se frôlaient à peine. Et au-dessus d’eux, le bruissement des grands sapins, aussi léger qu’un froissement de plumes d’oiseaux, descendait sur leurs têtes comme une lente et large bénédiction.