Page:Audoux - L Atelier de Marie Claire.djvu/263

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joli et d’accès facile. Il me forçait à suivre avec lui, et disait :

— Choisissez-nous un beau pays.

Je me lassais vite de chercher. Ma pensée s’en allait loin de la Seine ou de la Marne, vers un pays que j’avais choisi depuis longtemps et où j’aurais voulu vivre toujours.

Ce pays, c’était une colline toute fleurie de bruyères roses qui s’appelait la Rozelle.

C’était aussi une rivière étroite et pleine de cailloux blancs qui s’appelait la Vive.

C’était encore un grand bois de sapins qui tenait tête au vent, et dont les grands arbres gardaient à leur pied un rond de sable sec où l’on pouvait s’asseoir et attendre la fin de la pluie. Dans ce pays il y avait un chien qui venait glisser son museau frais au creux de ma main. Et tout près de la rivière, dans une maison grande ouverte au soleil, il y avait un homme d’une trentaine d’années, au regard attentif, et au visage qui ne semblait fait que de douceur et de bonté.


Le quinze décembre approchait. C’était la date fixée pour notre mariage, et déjà Mme Dalignac s’occupait des derniers préparatifs. Cependant, avant de fêter ce grand jour, elle tenait absolument à se rendre sur la tombe de son mari. Elle était obsédée par cette idée depuis plus d’une semaine ; mais comme elle se sentait vraiment souffrante et que le cimetière de Bagneux était loin, elle avait comme une crainte d’y aller seule.