Page:Audoux - La Fiancee.djvu/19

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Et s’il arrivait qu’une nèfle malicieuse, pour faire courir après elle, échappât au tablier, au panier ou à la casquette, c’étaient, mêlés à un clapotis joyeux, des cris et des rires qui apprenaient aux parents des maisons voisines que, dans le grenier ou le cellier, on allait voir mûrir sur la paille neuve de belles nèfles, qu’on ne mangerait qu’une à une comme la plus fine des gourmandises.

Il en était ainsi depuis que le clos et la maison délabrée qui le dominait étaient sans maîtres. Mais voici que cette année, au début du printemps, les gens du village virent arriver d’un faubourg de Paris le vieux Nestin et la vieille Nestine. Tous deux visitèrent la maison basse et longue, arpentèrent le clos, comptèrent les arbres fruitiers, inspectèrent la rivière et décidèrent aussitôt d’acheter le tout.

Nestin et Nestine étaient des époux sans enfants, ayant travaillé pendant des années et des années dans une cour sans air, où ils avaient économisé sou à sou, juste de quoi acheter la maison et le clos où ils allaient enfin pouvoir respirer à l’aise, pour le temps