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MARIE-CLAIRE

à sortir des sapins, elle me regardait longtemps sans bouger les yeux.

Dans ces moments-là, je pensais que Madeleine s’était transformée en chèvre. Il m’arrivait de la supplier de ne pas recommencer ; et j’étais sûre qu’elle me comprenait quand je lui faisais des reproches.

Comme je sortais un jour de la sapinière avec mes cheveux tout défaits, je fis un mouvement de la tête qui les ramena en avant. Aussitôt la chèvre fit un bond de côté en poussant un bêlement de peur. Elle revint sur moi, les cornes basses ; mais je baissai aussi la tête en secouant mes cheveux qui traînaient jusqu’à terre ; alors elle se sauva en faisant des cabrioles impossibles à décrire. Chaque fois qu’elle entrait dans la sapinière, je me vengeais en lui faisant peur avec mes cheveux.

Maître Sylvain me surprit un matin où je me lançais sur elle. Il fut pris d’un fou rire qui me remplit de confusion. Je m’arrêtai aussitôt en tâchant de relever mes cheveux sur ma tête.

La chèvre était revenue près de moi. Elle