Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 1.djvu/195

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comme le garde-à-vous des sentinelles sous les armes, et l’empêche de réussir dans ses noirs desseins.

Les facultés musicales de cet oiseau ont été souvent étudiées par des naturalistes européens et d’autres personnes qui trouvent plaisir à écouter le chant des divers oiseaux, soit en captivité, soit à l’état libre. Quelques amateurs ont même signalé les notes du rossignol comme pouvant, à l’occasion, parfaitement égaler celles de notre moqueur. Je les ai fréquemment entendus l’un et l’autre, en liberté comme en cage, et, sans crainte, sans prévention aucune, je le déclare ici : le chant de la philomèle d’Europe égalera, si l’on veut, celui d’une soubrettes de goût qui, ayant étudié sous un Mozart, peut produire à la longue quelque chose d’assez intéressant ; mais comparer ses essais au talent accompli du moqueur, c’est, dans mon opinion, tout à fait absurde.

On peut élever facilement l’oiseau moqueur, quand on le prend dans le nid, au moment convenable, c’est-à-dire lorsqu’il a de huit à dix jours. Il devient si familier et s’affectionne si bien, que souvent il suit son maître au travers de la maison. À Natchez, j’en ai vu un pris ainsi dans le nid, et qui pouvait aller et venir par le logis. Il se permettait de fréquentes excursions au dehors, puis, après avoir épanché ses mélodies dans les bois, il revenait à la vue de son gardien. Mais quelques soins, quelques précautions qu’on prenne pour perfectionner les facultés vocales de cet oiseau, quand il est retenu prisonnier, jamais on n’en fera rien qui, pour l’harmonie, puisse approcher du chant naturel.