Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 1.djvu/54

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couvrent nos riches terres d’alluvion. On tue facilement les dindons en les frappant sur la tête, au cou, ou bien à la partie supérieure de la gorge ; mais si le coup n’a porté que par derrière, ils peuvent encore voler très loin, et on risque de les perdre. — En hiver, beaucoup de nos chasseurs émérites les affûtent au clair de lune, sur la branche ils resteront souvent sans s’effrayer d’une première décharge, eux qui fuiraient à la vue d’un hibou ; et c’est ainsi que des troupes presque entières peuvent être abattues par des tireurs habiles. On en détruit aussi de grandes quantités au moment hélas ! qu’ils en valent le moins la peine, c’est-à-dire, au commencement de l’automne, alors qu’ils cherchent à traverser les rivières, ou bien immédiatement après qu’ils ont touché le bord.

À propos de ces chasses aux dindons, permettez-moi de vous rapporter un épisode dans lequel j’ai figuré moi-même, et qui n’est pas sans quelque intérêt : je cherchais du gibier, une après-midi, tard, dans l’automne, à cette époque où les mâles se rassemblent entre eux, et où les femelles s’en vont également de leur côté. J’entendis glousser une de ces dernières ; je regardai, et l’ayant aperçue perchée sur une clôture, je me dirigeai vers elle ; tout en m’avançant lentement et avec précaution, je crus entendre aussi les notes glapissantes de quelques mâles, et je m’arrêtai pour écouter dans quelle direction ils venaient. Quand je m’en fus bien assuré, je courus au-devant d’eux, me cachai le long d’un gros tronc d’arbre qui était tombé, armai mon fusil, et attendis avec impatience le moment propice.