Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/20

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la Bernache ou d’autres veulent partager avec elle le même étang, elle les force à se tenir à distance, et, pendant les migrations, ne souffre aucune de ces étrangères dans ses rangs.

Son vol est ferme, assez rapide et très prolongé. Une fois qu’elle a gagné les hautes régions de l’air, elle s’avance d’un mouvement constant et régulier. En s’élevant de terre ou de la surface de l’eau, elle a coutume de faire quelques pas en courant, les ailes toutes grandes ouvertes ; mais quand elle est surprise et que ses plumes sont bien développées, un simple élan de son large pied palmé suffit pour lui faire prendre l’essor. Quand elles partent en troupe pour quelque long voyage, elles s’enlèvent à environ un mille dans l’air, et passent en se dirigeant tout droit vers le lieu de leur destination. Leurs clameurs, alors, s’entendent au loin, et l’on distingue très bien les divers changements qui s’opèrent dans l’ordre et la disposition de leurs rangs. En de telles circonstances, je le répète, elles s’avancent avec la plus grande régularité ; néanmoins, lorsqu’aux premiers beaux jours on les voit s’en retourner du sud vers le nord, elles volent beaucoup plus bas, se posent plus souvent, et se laissent assez facilement mettre en désarroi, soit par la rencontre subite d’un épais brouillard, soit en passant au-dessus des villes et des bras de mer où elles peuvent apercevoir de nombreux vaisseaux. Alors la consternation s’empare de toute la bande ; les rangs se rompent, elles se mêlent, ne font que tournoyer, et l’on entend une sorte de can can perpétuel qui ressemble au bruit confus d’une multitude