Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/218

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terre, ramassa les haches et regagna, de son mieux, la maison du maître, pour raconter sa triste aventure.

Il pouvait y avoir deux ans que ce malheur était arrivé, lorsqu’un soir, voyageant entre Henderson et Vincennes, je m’arrêtai pour passer la nuit, dans une ferme située au bord de la route. Après avoir mis mon cheval à l’écurie et m’être rafraîchi moi-même, j’entrai, comme c’est mon habitude, en conversation avec le fermier, qui me demanda si je voulais aller avec lui rendre visite à quelques fosses à loups qu’il avait établies à environ un demi-mille de chez lui. J’accédai bien volontiers à sa proposition, et le suivis, à travers champs, jusque sur la lisière d’un bois épais où j’aperçus bientôt les engins de destruction. Les fosses, au nombre de trois, à quelques centaines de mètres l’une de l’autre, et pouvant avoir huit pieds de profondeur, étaient plus larges d’en bas, de manière qu’une fois tombé dedans, aucun animal ne pût s’en échapper. L’ouverture était couverte d’une plate-forme à bascule construite de branchages et fixée à un axe central qui formait pivot. Dessus, on avait attaché un gros morceau de venaison corrompue, dont les exhalaisons, peu flatteuses pour mon odorat, étaient cependant propres à attirer les loups. Mon hôte était venu les visiter ce soir-là, simplement parce qu’il avait l’habitude de le faire chaque jour, pour s’assurer que rien n’était dérangé. Il me dit que les loups abondaient, cet automne, et lui avaient mangé presque tous ses moutons et l’un de ses poulains, mais qu’il s’apprêtait à le leur faire payer cher ; il ajouta que si je voulais tarder de