Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/26

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alliée de très près. Quand c’est à l’aile qu’on l’a blessée, elle plonge parfois à une petite profondeur, et s’échappe avec une prestesse étonnante, toujours dans la direction du rivage. Dès qu’elle l’a touché, vous la voyez se traîner parmi les herbes ou les broussailles, le cou tendu un ou deux pouces au-dessus de terre, et marchant si doucement, qu’à moins d’avoir l’œil constamment dessus, on est presque certain de la perdre. Si on la tire sur la glace et qu’elle se sente frappée, elle se met aussitôt à fuir, mais fièrement et d’un pas assuré, de manière à vous faire croire qu’elle n’a aucun mal ; et elle ne cesse de crier bruyamment, comme à l’ordinaire ; mais, du moment qu’elle a gagné le bord, elle devient silencieuse, et disparaît, ainsi que nous venons de l’indiquer.

Un jour, sur la côte du Labrador, je fus vraiment surpris de l’habileté avec laquelle l’un de ces palmipèdes, alors dans sa mue, et par conséquent tout à fait incapable de s’envoler, sut manœuvrer, tout le temps, pour se dérober à notre poursuite. On l’aperçut d’abord à quelque distance de la rive : à l’instant, le bateau fut lancé après elle ; mais s’étant mise à nager de toutes ses forces, elle faisait mine de vouloir gagner directement la terre, et quand nous n’en fûmes plus qu’à quelques pas, elle plongea. Nous ne savions ce qu’elle était devenue ; chacun se tenait sur la pointe des pieds pour voir à quel endroit elle allait reparaître, lorsque, par hasard, l’homme qui était au gouvernail venant à baisser les yeux vers la poupe, l’aperçut presque sous le bout de notre barque, son corps toujours enfoncé