Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/308

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’hameçon. Leur appétit est complaisant, non moins que celui du vautour ; et chaque fois qu’une bonne occasion se présente, ils se gorgent au point de n’offrir plus qu’une proie facile à leurs ennemis, la Sphyrène et le marsouin à nez en bouteille. Une fois, on en piqua un, tandis qu’il s’en allait nageant nonchalamment sous la poupe de notre vaisseau, et on lui trouva l’estomac complétement garni de poissons volants disposés côte à côte, tous la queue par en bas ; ce qui m’a fait dire que le dauphin avale toujours sa proie en commençant par la queue. Il y en avait vingt-deux, longs chacun de six à sept pouces, et ils étaient empilés, comme les harengs salés dans un baril.

La longueur ordinaire des dauphins qu’on prend dans le golfe du Mexique est d’environ trois pieds ; je n’en ai pas vu qui excédassent quatre pieds deux pouces, et même l’un de ces derniers ne pesait que dix-huit livres. Ce poisson, en effet, est très étroit, eu égard à sa longueur ; seulement en hauteur il regagne un peu. Lorsqu’il vient d’être pris, la nageoire supérieure qui se continue, de l’avant de la tête, presque jusqu’à la queue, paraît d’un beau bleu sombre ; le dessus du corps, dans toute son étendue, présente une couleur d’azur, et le dessous, de splendides reflets d’or irrégulièrement semés de taches bleu foncé. Il faut croire qu’ils entrent parfois dans les eaux extrêmement basses, puisque lors de mon dernier voyage, le long de la côte des Florides, on en prit plusieurs dans une seine, avec le chevalier[1] leur parent, dont je parlerai plus tard.

  1. Eques Americanus, Bloch. De la famille des Lophiodontes.