Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/404

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

rougeâtre ne colore plus que les dernières cimes des arbres. L’estomac des Pélicans réclame à grands cris, et pour le satisfaire, il faut maintenant travailler : ils se lèvent avec effort sur leurs jambes semblables à des piliers, et entrent pesamment dans l’eau. Mais quel changement soudain ! Voyez comme ils flottent, agiles et légers ; leurs lignes se déploient, et de leurs pieds larges comme des rames ils se poussent en avant. Là-bas, dans cette anse que forme le fleuve, sautillent les petits poissons, sur l’onde paisible, saluant peut-être à leur manière le départ de l’astre du jour, peut-être cherchant quelque chose pour leur souper. Il y en a des milliers ; et leurs ébats mêmes, faisant étinceler les eaux, trahissent leur présence et appellent les ennemis. Aussitôt les Pélicans, sachant combien la proie aux brillantes écailles est prompte à leur échapper, élèvent au vent leurs vastes ailes, s’élancent en donnant de vigoureux coups de pieds, enferment les pauvres poissons dans les eaux basses, le long du rivage, puis ouvrant leurs énormes poches, comme autant de filets, en prennent et en dévorent des centaines à la fois.

N’est-il pas étonnant qu’on trouve ces oiseaux s’occupant à leurs nids, dans les régions du Nord, précisément vers la même époque où on les rencontre sur les baies intérieures du golfe du Mexique ? Le 2 avril 1832, j’en vis un grand nombre près de l’embouchure sud-ouest du Mississipi ; et quelques années après je les retrouvai, au même moment, sur chaque île, chaque baie ou rivière, en m’avançant vers le Texas ; ensuite, au 1er mai, j’en aperçus quelques-uns sur la baie