Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/426

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grosse que le reste du corps, et ses fortes nageoires épineuses formaient un obstacle redoutable. Néanmoins l’Anhinga l’avala d’une seule bouchée, la tête la première. Une heure et demie après il était digéré, et il lui en fallut encore trois autres un peu plus petits. Une autre fois nous en mîmes plusieurs devant lui, qui avaient de sept à huit pouces ; il en avala neuf, sans désemparer. Pour un seul repas, il en mangeait au moins une quarantaine de trois pouces à trois pouces et demi. Nous le nourrissions aussi de plaises[1], et il en avalait qui avaient quatre pouces de large, en dilatant sa gorge et les comprimant pendant qu’elles descendaient dans son estomac. Il paraissait ne pas aimer les anguilles ; du moins il mangeait les autres poissons les premiers, et renvoyait celles-ci pour la fin. Sur l’étang, au bout du jardin, il plongeait assez souvent et rapportait parfois une écrevisse, qu’il serrait fortement et battait de côté et d’autre en la tenant dans son bec, évidemment pour la blesser et l’étourdir avant de l’introduire dans son gosier ; jamais il ne prenait de poisson qu’il ne lui fît subir le même traitement.

Pendant le séjour que je fis sur les bords du Bayou-Sara, dans l’État de Mississipi, j’allais assez souvent rendre visite à quelques connaissances qui demeuraient à Pointe-Coupée, presqu’en face l’embouchure du Bayou.

  1. Pleuronectes dentatus. Poisson hétérosome, qui a les deux yeux à gauche, et dont la nageoire caudale est arrondie. Ses écailles sont dentelées ; son côté gauche est parsemé de points rouges et de teintes noires. On le pêche dans les eaux de la Caroline.