Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/457

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donné devant nous des preuves de cet instinct remarquable. »

En observant les manœuvres de l’Écumeur, pendant qu’il faisait sa pêche, quelquefois une bonne heure avant la nuit, je le voyais passer sa mandibule inférieure sous l’eau, de manière à former un angle d’environ 45 degrés, tandis que la supérieure, qui est mobile, s’élevait un peu au-dessus de la surface. De cette façon, les ailes étendues et redressées, il labourait l’élément poissonneux, en poussant, d’une haleine, son sillon à plusieurs mètres ; puis il s’enlevait et retombait par intervalles, selon qu’il le jugeait nécessaire pour s’assurer de sa proie quand il l’avait en vue ; car je suis certain que jamais il n’enfonce sous l’eau sa mandibule inférieure, qu’auparavant il n’ait aperçu l’objet qu’il poursuit et voilà pourquoi ses yeux sont constamment dirigés en bas, comme ceux du sterne et du fou. Maintes fois, je me suis tenu pendant près d’une heure sur le bord d’un petit étang d’eau salée, communiquant avec la mer, tout exprès pour voir passer ces oiseaux à quelques verges de moi. Ils semblaient alors ne pas s’inquiéter du tout de ma présence, et s’occupaient tranquillement à leur pêche, de la manière que je viens d’indiquer. Au commencement, ils gardaient le silence, puis devenaient bruyants à mesure que l’ombre gagnait, et bientôt faisaient entendre leurs notes habituelles d’appel, semblables aux syllabes hurk, hurk, deux ou trois fois et assez promptement répétées, comme pour engager quelque camarade à suivre leur sillage. D’autres que j’ai vus de cette manière fendre les eaux, toujours en quête de la proie,