Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/476

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plés, et souvent en files de plus de cent. Bientôt après on les voit se becqueter comme font les cormorans, et la copulation s’accomplit sur les rochers mêmes, et jamais sur l’eau, ainsi qu’on l’a quelquefois supposé. Du reste, l’époque de leur arrivée aux lieux où ils veulent nicher paraît dépendre de la latitude : sur Bass-Rock, dans le Firth of Forth[1], ils se montrent dès le mois de février ; tandis que dans le golfe de Saint-Laurent, on ne les voit pas sur le Grand-Rocher avant le milieu d’avril ou le commencement de mai. À Château-Beau, dans les détroits de Belle-Isle, ils ne paraissent encore que quinze jours ou trois semaines plus tard. Doués du même naturel que les membres des plus nombreuses communautés d’oiseaux, les Fous, bien qu’à ce moment ils aiment réellement à vivre en société, manifestent cependant, dès que l’incubation commence, beaucoup d’animosité contre leurs plus proches voisins. Par exemple, une femelle paresseuse, trouvant plus commode de piller le nid de ses amies que d’apporter de loin les herbes et autres matériaux nécessaires pour la construction du sien, se hasarde parfois à envahir la possession d’une autre ; aussitôt toutes prennent part à l’injure faite à leur camarade, et de bons coups de bec sont dirigés contre la voleuse, en plein jour, à la vue de ses sœurs rassemblées et qui ne manquent pas d’applaudir au châtiment, en se passant la nouvelle de l’une à l’autre, jusqu’à ce que la troupe entière soit

  1. Firth of Forth (Bodotria œstuarium). Golfe formé par la mer du Nord, sur la côte orientale de l’Écosse.