Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/7

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tenant qui vient, après un combat d’une demi-heure ou plus, d’infliger à quelque rival une défaite complète : il s’avance avec orgueil vers le doux objet, prix de sa victoire ; la tête à peine élevée d’un pouce au-dessus de la terre, le bec ouvert de toute sa grandeur, sa langue charnue redressée, ses yeux lançant des regards de défi, il siffle avec force à chaque pas, tandis que l’émotion qui le domine encore fait hérisser ses plumes dont les tuyaux, en s’entre-choquant, frémissent et rendent un bruit sourd. Mais le voilà près de celle qui, à ses yeux, est la beauté même ; son cou s’incline et se redresse ; il tourne galamment autour d’elle, il aime à la toucher en passant ; elle, de son côté, le félicite de sa victoire, lui rend ses tendres caresses, et leurs cous amoureux se confondent et s’enlacent de mille manières. À ce moment, le feu de la jalousie dévore le vaincu ; il va recommencer la bataille, car lui aussi il veut être heureux ! Les yeux enflammés de rage, il se précipite, secoue ses larges ailes, et s’élance sur son ennemi en poussant un sifflement redoutable. À ce signal, toute la troupe s’arrête ; étonnée, elle fait place et se range en cercle pour regarder le combat. Le champion déjà favorisé ne se détourne même pas de sa femelle, et sans faire attention à de pareilles menaces, se contente de jeter un regard de mépris à son ennemi ; mais lui, le dédaigné, se redresse, entr’ouvre ses robustes ailes, et, en détachant à celui-ci un coup violent à son tour, il le défie. Comment, en si nombreuse société, supporter un pareil affront ? D’ailleurs