Page:Augier - Théatre complet, tome 1.djvu/365

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Adrienne.

Vous avez cru lui plaire : elle vous l’avait dit.
Il est vrai maintenant que son cœur s’en dédit ;
Mais la fatuité de l’homme est si têtue
Qu’il lui faut vingt échecs pour se croire battue.

Stéphane.

Pour moi, je crois si bien mon désastre accompli,
Madame, que j’en suis tout vengé par l’oubli.

Adrienne.

Si vraiment vous avez cette philosophie,
Je vous fais compliment ; car je vous certifie
Que Gabrielle…

Stéphane.

Que Gabrielle…Quoi ! vous saviez ?…

Adrienne.

Que Gabrielle… Quoi ! vous saviez ?…Je savais.
Et j’avoûrai, de plus, que je vous desservais !
Donc je vous certifie, et vous pouvez m’en croire,
Qu’il ne reste plus rien de vous qu’en sa mémoire.

Stéphane.

Vraiment ! Se souvient-elle encore de mon nom ?
Dans quinze jours d’ici je jurerais que non.
Beau texte pour parler avec quelque amertume
De ce sexe volage au vent comme la plume !
Mais, bah ! j’en fais mon deuil sans phrase et sans effort.

Adrienne.

Votre deuil est trop gai : le défunt n’est pas mort.
Tenez, ne perdons pas de temps en bagatelle :
Vous avez parlé bas tantôt à Gabrielle
En la quittant.