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IV. Période Gothique. — Le gothique est enté sur le roman, qu’il consolide et développe.

En dépit des apparences, la voûte d’arêtes romane n’avait pas toute la solidité désirable. Elle était, en outre, d’une exécution difficile. Ces raisons utilitaires ont-elles seules déterminé la condamnation de ce style ? Il y a des motifs pour croire que les artistes se lassèrent de l’aspect massif de l’édifice ; et puis, sa privation intérieure de clarté les gênait. Double série de prétextes et de causes qui les conduisirent à désirer et à chercher un perfectionnement du système.

Une première transformation, peut-être inspirée des Byzantins, « consiste dans une suite de berceaux perpendiculaires à l’axe du vaisseau qu’ils couvrent ; ils se contrebutent et ne chargent que les doubleaux et les murs extérieur[1]. Bien qu’elle ait laissé des traces dans de nombreuses églises dès le XIIe siècle, cette méthode ne fut jamais d’une application généralisée et on l’abandonna vite.

La voûte en coupole, qui se définit par elle-même, autre essai d’amélioration, ou plutôt, peut-être, style intervenu en concurrence avec le style roman (car Saint-Front de Périgueux, construit d’après ce système, est de 1120) et sous une influence certainement orientale, a donné de très curieux et très beaux monuments : par exemple, outre Saint-Front, Saint-Étienne de Périgueux, Saint-Jean de Côle, les cathédrales de Cahors et d’Angoulême. Ce système, qui respecte les principes essentiels du roman et n’invite pas l’édifice à se développer en de vertigineuses hauteurs, qui du reste est contemporain des établissements des Croisés en Orient, évoque invinciblement le souvenir du Saint-Sépulcre de Jérusalem. Il procure au bâtiment, avec une extrême solidité qui lui permet de se passer de charpente, un aspect grandiosement monumental et d’une opulente élégance. Il faillit s’imposer. Mais ses progrès furent tout à coup arrêtés par la découverte du procédé de la voûte d’ogives : c’est ainsi que des églises commencées pour être terminées en coupoles furent voûtées en ogives.

Ce qu’on peut retenir de ces deux tentatives, c’est que l’ogive n’est pas le développement logiquement inévitable du cintre. Il eût pu recevoir telle autre accommodation, et il est curieux d’observer que, dans de grandes constructions toutes modernes, on a préféré à l’ogive, considérée peut-être comme épuisée, un autre principe d’architecture, notamment la coupole.

  1. André Michel, Histoire de l’Art, tome II, 1re partie, L’Architecture gothique, par M. Camille Enlart.