Page:Auguste de Gérando - La Transylvanie et ses habitants, 1845, Tome I.djvu/429

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pour qui tout ce mouvement et toute cette fatigue ? Pour un étranger dont ils ignoraient jusqu’au nom, qu’ils ne devaient plus revoir, et qui savait à peine parler leur langue.

En témoignant une bienveillance extrême à l’étranger et au pauvre, le gentilhomme hongrois semble dire qu’il traite d’autant mieux son hôte qu’il a moins à en attendre. Beaucoup de réfugiés polonais ont trouvé dans les châteaux de Transylvanie un asyle sûr. Je me suis arrêté un jour à Kerlés, chez un magnat qui, bien qu’ayant éprouvé de grands revers de fortune, avait chez lui six de ces exilés. La générosité est une des qualités du caractère hongrois. On m’a montré une jeune femme qui, assistant à un dîner splendide, vit apparaître à la fenêtre un mendiant vieux et amaigri. Vivement émue à ce spectacle inattendu, elle détacha son collier de perles et le jeta au vieillard.

Du reste, qu’il se trouve ou non des étrangers au château, on est toujours sûr, aux heures des repas, d’y rencontrer nombreuse compagnie. Le seigneur ne dîne pas seul. Il admet à sa table l’intendant, l’économe, tous ceux que l’on appelle les officiers de la cour : car le gentilhomme hongrois donne à sa résidence le nom de cour, udvar, absolument comme le roi ; ajoutons qu’il n’est pas moins indépendant que lui. Tous s’asseyent à une longue table dont le haut bout est occupé par le magnat et les siens ; les autres y figurent à des places