Page:Auguste de Gérando - La Transylvanie et ses habitants, 1845, Tome I.djvu/43

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les différents métiers. Comme ils ne s’expatrient pas sans d’excellentes raisons, et se proposent de quitter le pays dès qu’ils ont suffisamment gagné, ils ne se font pas une loi d’être probes. De là leur réputation. J’avais oublié dans une auberge une bague à laquelle je tenais fort. Le postillon détela un cheval, partit au galop et revint avec l’objet que je croyais perdu. Je lui demandai comment il s’y était pris pour les retrouver. Il n’y avait dans l’auberge, répondit-il, que des paysans ; voyant que le bijou n’était pas sur la table où vous l’aviez laissé, j’ai dit à l’aubergiste, qui jouait la surprise : « Tu es le seul Allemand ici, donc c’est toi qui as pris la bague. »

L’avidité et la ruse de ces étrangers qui inondent le pays dégoûtent à l’excès le Magyar, et il croirait se déshonorer s’il était autre chose que laboureur, berger ou soldat. Il a un respect profond pour la terre, et la cultive avec orgueil. Berger, il passe des mois entiers hors de son toit ; on le voit, enveloppé dans son grand manteau blanc, assis à la manière tatare sur le bord des chemins, le regard perdu dans l’immensité des steppes, mener par excellence la vie contemplative. Bien qu’il aime peu le gouvernement autrichien, — il appelle le souverain a’ német császár, « l’empereur allemand », comme s’il s’agissait d’un prince étranger, — le Magyar est volontiers soldat, car il obéit à ses instincts belliqueux.