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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome I.djvu/152

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histoire de saint augustin.

cellions devaient tout faire pour les contenir, sous peine de voir ces terres occupées par le fisc ; il fallait que les fureurs insensées des circoncellions eussent un terme, autant dans l’intérêt du repos public que de la foi catholique. Marcellin disait aux évêques, en finissant, qu’un examen des actes de la conférence leur donnerait la pleine certitude que le parti de Donat avait été une erreur, et que Cécilien et les autres avaient été faussement accusés. Le président de l’assemblée de Carthage payera cher la sincérité de sa sentence[1].

Ainsi Augustin achevait son œuvre contre les donatistes ; Alype et Possidius n’avaient pris la parole que pour des questions de formalités et pour des incidents ; l’évêque d’Hippone porta seul le poids de la conférence dans ce qu’elle eut de grave et de théologique ; en lisant les actes de la célèbre séance du 8 juin 411, nous avons admiré la présence d’esprit, la science profonde, le langage net et plein, l’angélique douceur de cet homme aux pieds de qui venaient mourir toutes les attaques, qui ne laissait aucune ombre autour de l’image de la vérité, et qui montra dans ce jour une patience grande comme son génie. Les peuples, et surtout les peuples donatistes avaient oublié l’origine du schisme ; le grand but des habiles de ce parti était d’empêcher que le jour ne pénétrât dans les ténèbres de leur affaire ; chaque rayon de lumière leur donnait de l’épouvante. Augustin, dans ses écrits, avait établi la vérité contre les donatistes, plus invinciblement qu’il ne put le faire dans la conférence ; mais il est surprenant qu’au milieu de tant d’interruptions et d’interpellations, il ait eu encore la puissance de faire triompher les principes de la foi chrétienne. Le monde chrétien tenait les yeux attachés sur cette assemblée de Carthage ; lorsque l’évêque d’Hippone voyait de pitoyables chicanes prendre la place des intérêts immenses de la foi : « On nous attend ! s’écriait-il ; ce n’est pas seulement cette ville, c’est presque le genre humain tout entier ; on désire apprendre quelque chose sur l’Église, et nous sommes là discutant des formules de barreau et plaidant misérablement sur des riens ! » On peut faire un rapprochement curieux. Ce fut en 311 que soixante et dix évêques, à Carthage, condamnèrent Cécilien sans l’entendre. Ce fut en 411 que deux cent soixante-dix-huit évêques donatistes furent condamnés à Carthage, après avoir été entendus !

Les actes de la conférence de Carthage offrent un remarquable caractère d’exactitude dans les plus petits détails. On ne saurait imaginer plus de soins et de précautions. Ils sont parvenus jusqu’à nous, sauf la dernière partie de la séance du 8 juin. Ces actes fermaient éternellement la bouche aux donatistes, mais leur énorme étendue en rendait la lecture bien difficile à la plupart des chrétiens. Nul ne songeait à remuer cette masse de pièces et de discours au profit des intelligences avides de savoir ce qui s’était passé. Augustin, chargé de travaux, faible de santé, fit un acte de zèle admirable[2] en touchant à ces comptes-rendus auxquels les donatistes avaient donné une fastidieuse longueur pour que personne n’eût le courage d’y chercher la vérité. Un abrégé avait été tenté, mais il était mal fait. Augustin voulut donc en rédiger un lui-même, et son travail, qui nous est parvenu sous le titre de Breviculus collationis cum donatistis, est une succincte et excellente exposition des trois séances de Carthage.

Comme nous l’avons dit, ce fut presque toujours Augustin qu’on entendit dans la défense de la foi en face des évêques donatistes ; mais dans son travail d’abréviation il s’efface, et met sous le nom général des catholiques tous ses discours, toutes ses réponses. À l’aide de cet abrégé, à la fois substantiel et net, tout le monde en Afrique put connaître la vérité sur la conférence avec les donatistes. Les évêques catholiques eurent soin d’en répandre des milliers de copies. Les plus zélés d’entre eux décidèrent que, chaque année, au temps du carême, on lirait dans leurs églises les actes de la conférence[3]. L’empereur Honorius autorisa ces actes par une loi du 30 août 414.

La vérité, dans cette question, perçait les yeux des aveugles, comme dit Augustin[4], et pénétrait de force dans les oreilles des sourds. Le schisme n’aurait pas pu se prolonger durant tant d’années si les chefs du parti de Donat avaient témoigné la moindre sincérité. Le jour où ils furent contraints de s’expliquer, ils furent vaincus. Il ne restait plus aux catholiques qu’à tirer parti de la victoire et à aider les

  1. On peut lire utilement François Baudouin, sur la conférence de Carthage, en 411.
  2. Lettre 139, à Marcellin ; lettre 185, au comte Boniface.
  3. Le livre des Gestes avec Emeritus.
  4. Actes de la Conférence.