homme intérieur sera renouvelé à l’image de Dieu. Le grand Apôtre établit par là l’unité et la spiritualité de notre âme : il n’appartient qu’à une substance immatérielle de pouvoir être l’image de Dieu. Les idées de Victor sur la corporéité de l’âme seront renversées par l’argumentation et les explications d’Augustin. Le ciel et la terre, les fleuves, les mers, les forêts et les animaux nous apparaissent dans nos songes ; les variétés de l’univers subsistent dans notre pensée et sont contenues dans les profondeurs de la mémoire ; elles sortent de je ne sais quels coins secrets lorsque nous avons besoin de nous en souvenir, et se présentent en quelque sorte devant nos yeux. Si l’âme était un corps, pourrait-elle saisir par la pensée ces grandes et vastes images, et la mémoire pourrait-elle les contenir ?
Augustin, en finissant, engage le jeune Africain à ne pas se plaire dans son surnom de Vincent, le chef des rogatistes, s’il veut être le Victor[1] (le vainqueur) de l’erreur : « Ne croyez pas savoir une chose quand vous l’ignorez, « lui dit-il ; mais pour apprendre apprenez à ignorer[2]. On ne pèche point en ignorant quelque chose des secrets ouvrages de Dieu, mais en donnant témérairement pour choses connues celles qui ne le sont point, ruais en produisant et en défendant le faux à la place du vrai. » Si Victor désire connaître toutes les erreurs dont son ouvrage abonde, qu’il vienne à Augustin sans ennui et sans difficulté ; « ce ne sera point, lui dit ce grand homme, un disciple qui viendra trouver un maître, mais un jeune homme qui se rendra auprès d’un vieillard, un homme vigoureux qui visitera un malade. »
Cette douceur généreuse et cette parfaite condescendance, réunies à tout l’ascendant d’une admirable raison, ne furent point inutiles ; Victor, dont l’esprit était sincère et qui n’avait cédé qu’à un mouvement irréfléchi de jeunesse et à la fougue du génie africain, se rendit aux opinions de l’évêque d’Hippone ; il reconnut qu’il s’était trompé, et remercia Augustin de lui avoir fait toucher du doigt ses erreurs avec une si paternelle bonté. La charité et le génie, ces deux grandes puissances de ce monde, ne se donnent pas toujours la main, mais quand leur sublime alliance vient à se montrer dans le même homme, oh ! alors la vérité prend une force irrésistible.
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CHAPITRE QUARANTE-CINQUIÈME.
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(419-420.)
Il est doux pour l’historien d’un grand homme de pouvoir s’entourer des hommages rendus à sa mémoire et prêter l’oreille aux concerts des siècles. Ces voix, parties de haut, nous excitent à l’accomplissement d’une grave laborieuse tâche et donnent à notre âme une aorte d’énergie mêlée de joie. On ferait un livre avec les témoignages imposants qui se sont produits depuis quatorze cents ans en l’honneur d’Augustin ; nous ne songeons donc point à tout recueillir ; nous voulons nous en tenir à quelques paroles qui expriment les opinions des plus glorieux représentants des divers âges chrétiens.
On a vu dans les chapitres précédents comment Augustin fut jugé par ses contemporains, et nous n’avons pas à nous occuper ici de l’admiration des Jérôme, des Paulin, des Simpli-