Aller au contenu

Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome I.djvu/521

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

te couvrira de fruits ; et tu auras un trésor dans le ciel ; et puis, suis le Seigneur, si tu veux être parfait et devenir le compagnon de ceux à qui il parle le langage de la sagesse, lui qui sait et te fera savoir ce que c’est que le jour, ce que c’est que la nuit, afin que les astres brillent aussi pour toi au firmament de son ciel ; chose impossible, si ton cœur n’y est déjà ; et là ne sera jamais ton cœur, si là n’est point ton trésor, comme te l’a dit le bon Maître ( Matth. VI, 21). Mais la tristesse se répandit sur la terre stérile, et les épines étouffèrent la parole ( Ibid. XIX, 16, 22).

25. Pour vous, race d’élection, faibles du monde, qui avez tout quitté pour suivre le Seigneur, allez et confondez les puissances du siècle. Que vos pieds radieux marchent sur sa trace ! Etincelez au firmament ( I Pierre, II, 19), afin que les cieux racontent sa gloire, en discernant la lumière des parfaits qui sont encore loin des anges, et les ténèbres des petits déjà sauvés de vos mépris ! Brillez sur toute la terre ! Que ce jour, éblouissant des clartés de ce soleil, annonce au jour le Verbe de sagesse, et que cette nuit soit le clair de lune qui annonce à la nuit le Verbe de science ( Ps. XVIII, 2). La lune et les étoiles luisent sur la nuit, sans être obscurcies par ses ténèbres ; elles lui donnent toute la lumière qu’elle peut recevoir. Et, comme si Dieu eût dit : Que les astres soient dans le firmament du ciel : voici soudain un grand bruit venu d’en-haut, comme un tourbillon violent, et des langues de feu rayonnent et se divisent en s’arrêtant sur la tête de chacun d’eux ( Actes, II, 2, 3) : et il se fit comme un firmament d’astres possesseurs du Verbe de vie. Courez partout, flammes de sainteté, feux admirables ! Car vous êtes la lumière du monde, et le boisseau ne vous couvre pas. Celui à qui vous vous êtes attachés a été exalté dans la gloire, et il vous a exaltés. Courez donc, et révélez-vous à toutes les nations.

Chapitre XX, Sens mystique de ces paroles : « que les eaux produisent les reptiles et les oiseaux ( Gen. I, 20). »

26. Que la mer conçoive aussi, qu’elle enfante vos œuvres, et que les eaux produisent les reptiles des âmes vivantes ! Car en séparant le pur de l’impur, vous êtes devenus la bouche de Dieu ( Jérém. XV, 19), et c’est par vous qu’il dit : « Produisent les eaux, » non pas des âmes vivantes, productions de la terre ; « mais des reptiles d’âmes vivantes, et les oiseaux qui volent au-dessus de la terre ! » Ces reptiles, mon Dieu, sont vos sacrements qui, par les œuvres des saints, se sont glissés à travers les flots des tentations du siècle, pour régénérer les peuples dans le baptême en votre nom. Et ainsi se sont produites de grandes merveilles, « semblables aux baleines monstrueuses, » et les voix de vos messagers ont plané sur la terre et sous le ciel de votre Ecriture, autorité protectrice, qui s’étend partout où leur vol se dirige. « Et ce ne sont pas de sourds et vains accents que leurs paroles ; toute la terre en a été l’écho ; elles ont atteint les extrémités du monde ( Ps. XVIII, 4, 5) » car votre bénédiction, Seigneur, les a multipliées.

27. Mais n’est-ce pas erreur ? et ne confondrais-je pas les connaissances claires qui résident au firmament, et les œuvres corporelles qui s’opèrent sous ce firmament au sein orageux de la mer ? Non ; car ces mêmes connaissances, qui demeurent dans la fixité de leur certitude, et sans s’accroître par génération, comme les lumières de la sagesse et de la science, exercent cependant dans l’ordre réel une action différente et multiple, dont votre bénédiction féconde encore et multiplie les effets. Ô Dieu, vous nous consolez de l’infirmité de nos sens mortels, en permettant qu’une vérité, notion simple dans l’esprit, emprunte aux signes corporels, plus d’une figure, plus d’une expression.

Voilà les productions des eaux, mais grâce à votre parole ; productions nées de la misère des peuples devenus étrangers à votre vérité éternelle ; productions que les eaux ont fait jaillir de leur sein, comme un remède dont votre Verbe adoucissait leur languissante amertume.

28. Et toutes vos œuvres sont belles, car elles sortent de votre main ; mais que vous êtes incomparablement plus beau, divin auteur, du monde ! Oh ! si Adam ne se fût point détaché de vous, ses flancs n’eussent pas été la source de cet océan amer, de ce genre humain, curiosité sans fond, éternel orage de superbe, flot de mobilité ! Et alors les dispensateurs de votre vérité n’auraient pas eu besoin d’employer au sein des ondes tant de signes sensibles et (509) corporels,