Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome IV.djvu/426

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de la réponse de Moïse : car il dit que cela ne peut se faire ; parce qu’ils seraient un objet d’abomination pour les Égyptiens.

XXVIII. (Ib. 8, 26.) Les sacrifices des Israélites abominables aux yeux des Égyptiens. – Ces paroles de Moïse : « Cela ne peut se faire ainsi : car nous sacrifierons au Seigneur notre Dieu les abominations des Égyptiens » signifient : Nous ferons des sacrifices odieux aux Égyptiens, par conséquent nous ne pouvons sacrifier parmi eux ; tel est le sens qui résulte clairement des paroles suivantes : « Car si nous sacrifions des abominations sous leurs propres yeux, nous serons lapidés. » Plusieurs de nos interprètes, se méprenant sur le sens de ce passage, l’ont traduit de cette manière : Cela ne peut se faire ainsi ; est-ce que nous sacrifierons au Seigneur notre Dieu ce qui est abominable aux yeux des Égyptiens ? Mais l’Écriture a précisément voulu dire que les Hébreux devaient immoler ce qui était une abomination pour les Égyptiens. D’autres encore parmi les latins traduisent : Cela ne peut se faire ainsi, parce que nous ne ferons pas au Seigneur notre Dieu des sacrifices que les Égyptiens considèrent comme abominables. L’addition de la particule négative constitue un contre-sens, puisque Moïse a dit : « Cela ne peut se faire ainsi ; car nous sacrifierons au Seigneur notre Dieu des abominations pour les Égyptiens » et s’ils exprimaient la volonté d’aller au désert, c’était afin que les Égyptiens ne fussent pas témoins de leurs abominations. Il faut voir ici le même sens mystérieux, que nous avons déjà signalé à propos des pasteurs, qui étaient détestés des Égyptiens[1] ; c’est le motif pour lequel les Israélites reçurent une contrée à part, quand ils vinrent en Égypte. Les sacrifices des Israélites sont un objet d’horreur pour les Égyptiens, comme la vie des justes pour les méchants.

XXIX. (Ib. 8, 28.) L’endurcissement de Pharaon volontaire dans son principe. – Après la disparition des sauterelles, il est dit de Pharaon « Mais en ce temps-là encore Pharaon endurcit son cœur, et ne voulut point permettre au peuple de s’en aller. » Cette fois à coup sûr nous ne lisons pas de cœur de Pharaon fut endurci, mais « Pharaon endurcit son cœur. » C’est ce qui arriva certainement à toutes les plaies. Les vices ont en effet leur principe dans la volonté de l’homme. Des causes, souvent les mêmes, meuvent les cœurs des hommes de différentes manières, les uns dans un sens, les autres dans un autre, chacun suivant les dispositions particulières, qui ont leur principe dans la volonté.

XXX. (Ib. 9, 7.) Progrès de l’endurcissement de Pharaon. – « Lorsque Pharaon vit qu’aucun des animaux des enfants d’Israël n’était mort, son cœur s’endurcit. » Comment cet endurcissement du cœur de Pharaon eut-il son origine dans des motifs opposés ? Si les troupeaux des Israélites avaient péri, il y aurait eu pour lui, ce semble, une raison suffisante de s’endurcir jusqu’à mépriser Dieu, comme si ce désastre était l’œuvre de ses magiciens ; mais maintenant qu’il voit que pas un des animaux des Hébreux n’a péri, son cœur s’endurcit, quand il aurait dû se sentir porté à la crainte ou à la confiance : voilà jusqu’où a pu aller son endurcissement.

XXXI. (Ib. 9, 8.) Sur le rôle de Moïse et d’Aaron dans l’opération des miracles. – Que signifient ces paroles de Dieu à l’adresse de Moïse et d’Aaron : « Prenez, plein vos mains, de la cendre du foyer et que Moïse la jette vers le ciel en présence de Pharaon et de ses serviteurs, et qu’elle s’étende en poussière sur toute la terre d’Égypte » Les miracles précédents s’opéraient avec la verge qu’Aaron, et non point Moïse, étendait sur l’eau, ou dont il frappait la terre ; mais ici, après les deux miracles relatifs aux mouches et à la mortalité des troupeaux, où ni Aaron ni Moïse n’ont point apporté le secours de leur main, il est dit que Moïse doit jeter au ciel la cendre de la fournaise ; tous les deux doivent en prendre ; mais l’un pour la jeter au ciel, l’autre pour la répandre à terre : Aaron, dont le ministère regardait le peuple, dut frapper la terre ou étendre la main soit sur la terre, soit sur l’eau ; tandis que Moïse dont il a été dit : « Tu le représenteras dans toutes les choses qui ont rapport à Dieu[2], reçoit l’ordre de jeter la cendre au ciel. Que signifient les deux miracles précédents, où Moïse ni Aaron n’eurent aucune part ? Pourquoi cette différence ? Ce n’est pas pour rien.

XXXII. (Ib. 9, 16.) Patience de Dieu à l’égard de Pharaon. – « La vie t’a été conservée, pour faire éclater en toi ma puissance et pour rendre mon nom célèbre par toute la terre. » L’Apôtre cite ces mêmes paroles de l’Écriture, en traitant ce sujet extrêmement difficile. Et il ajoute « Mais si Dieu, voulant montrer sa colère et faire éclater sa puissance, a supporté les vases de colère avec une grande patience » en épargnant

  1. Gen. 46, 34
  2. Ex. 4, 16