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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome IX.djvu/644

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avantageux de rompre pour être avec le Christ[1] » ; mais nous ne sommes pas dans la chair en ce sens que nous avons donné à Dieu les prémices de l’esprit, si toutefois nous pouvons dire que « notre conversation est dans le ciel[2] » et que nous sommes agréables à Dieu par la tête, tandis que nous sentons glisser nos pieds, qui paraissent l’extrémité de notre âme), écoute comment il y a une espérance dans ce même psaume qui paraît chanter ce qui est accompli déjà : « Il a délivré, dit le Prophète, et mes yeux de leurs larmes, et mes pieds de toute chute » ; et toutefois il n’ajoute point : Je plais ; mais bien : « Je plairai au Seigneur, dans la terre des vivants[3] » ; montrant assez par là qu’il n’est point encore agréable au Seigneur dans cette partie de lui-même, qui est la région des morts, c’est-à-dire en sa chair mortelle. « Ceux qui sont dans la chair ne sauraient plaire à Dieu ». C’est pourquoi cette parole que l’Apôtre ajoute : « Quant à vous, vous n’êtes point dans la chair », doit s’entendre en ce sens, que « le corps est véritablement mort au péché, tandis que l’esprit est vivant à cause de la justice » ; or, c’est par cet esprit qu’ils plaisaient à Dieu, puisque c’est par lui qu’ils n’étaient pas dans la chair. Qui pourrait plaire au Dieu vivant, tandis qu’il est dans un corps mort ? Que dit l’Apôtre ? « Si l’esprit de celui qui a ressuscité Jésus-Christ d’entre les morts habite en vous ; celui qui a ressuscité le Christ d’entre les morts donnera aussi la vie à vos corps mortels à cause de l’esprit qui habite en vous[4] ». C’est alors que nous serons dans la terre des vivants, que nous plairons complètement au Seigneur, et que rien de nous-mêmes ne nous tiendra éloignés. « Tant que nous sommes dans un corps, nous sommes éloignés du Seigneur[5] » ; et plus nous en sommes éloignés, plus nous sommes éloignés aussi de la région des vivants. « Mais nous avons la confiance, et nous pensons qu’il est avantageux pour nous d’être séparés de ce corps, afin de demeurer dans le Seigneur ; c’est pourquoi nous nous efforçons de lui être agréables, soit que nous soyons éloignés, soit que nous soyons en sa présence[6] ». C’est là notre ambition pendant cette vie, parce que nous attendons la délivrance de notre corps[7] ; mais quand la mort aura été absorbée dans la victoire, quand ce corps corruptible aura revêtu l’incorruptibilité, quand ce corps mortel aura revêtu l’immortalité[8], alors il n’y aura ni pleurs, ni chute, et il n’y aura aucune chute, parce qu’il n’y aura aucune corruption. Dès lors nous ne chercherons plus à plaire à Dieu, mais nous lui plairons d’une manière absolue, dans la région des vivants.

  1. Phil. 1,23
  2. Id. 3,20
  3. Ps. 114,9
  4. Rom. 8,8-11
  5. 2 Cor. 5,6
  6. Id. 8,9
  7. Rom. 8,23
  8. 1 Cor. 15,53-54