Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome VII.djvu/230

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sommes trop petits pour en montrer la grandeur ; et si nous nous centons contraints de l’en bénir, c’est que nous ne voulons point rester avec, l’ingratitude du silence. Grâce à Dieu, toutefois, puisque nous pouvons croire fidèlement ce que nous ne saurions dignement expliquer.

4. Ainsi nous croyons en Jésus-Christ, Notre-Seigneur, lequel est né, par l’opération du Saint-Esprit, de la Vierge Marie. Cette Vierge bienheureuse a effectivement conçu par la foi Celui qu’avec foi elle amis au monde. Lorsqu’un fils lui eût été promis, elle demanda comment il naîtrait d’elle, qui ne connaissait point son mari, attendu qu’elle ne savait point d’autre manière de concevoir et d’enfanter que par le rapprochement des sexes, non qu’elle l’eût expérimenté jamais, mais la nature le lui montrait souvent dans les autres femmes. L’ange alors lui répondit : « L’Esprit-Saint descendra en vous, et la vertu du Très-Haut vous couvrira de son ombre ; c’est pourquoi ce qui naîtra saint de vous sera appelé le Fils de Dieu ». Et lorsque l’Ange eut ainsi parlé, pleine de foi et recevant le Christ dans son âme avant de le recevoir dans son sein. « Voici, dit-elle, la servante du Seigneur ; qu’il me soit fait selon votre parole[1] ». Que sans le concours de l’homme je conçoive en restant Vierge ; que du Saint-Esprit et d’une Vierge naisse Celui en qui l’Église renaîtra vierge du Saint-Esprit : Que ce Saint, qui naîtra d’une Mère sans avoir de père, se nomme le Fils de Dieu ; car c’est Celui qui est né de Dieu son Père sans avoir de mère, qui a dû se faire fils de l’homme, prendre un corps qui lui permette, à sa naissance, de sortir d’un sein fermé, et plus tard, à sa résurrection, d’entrer dans une demeure fermée également. Ces choses sont merveilleuses parce qu’elles sont divines ; ineffables, parce qu’elles sont incompréhensibles ; et si la bouche humaine ne peut les expliquer, c’est que le cœur de l’homme ne saurait les pénétrer. Marie crut donc et ce qu’elle crut s’accomplit en elle. Croyons aussi afin de pouvoir en profiter nous-mêmes. Si merveilleuse que soit à son tour cette seconde naissance, songe, ô homme, à ce que ton Dieu, a fait pour toi, à ce que le Créateur a entrepris pour sa créature c’est Dieu qui tout en demeurant dans le sein de Dieu, c’est l’Éternel qui tout en vivant avec l’Éternel ; c’est le Fils qui tout en restant l’égal de son Père, n’a pas dédaigné de se revêtir d’une nature d’esclave, en faveur de ses esclaves, coupables et pécheurs. Ah ! ce n’est point ce que méritaient les hommes. Nos iniquités appelaient plutôt la vengeance sur nos têtes ; mais si Dieu y avait eu égard, qui serait resté debout ? C’est donc pour ses esclaves impies et pécheurs que : le Seigneur a daigné se faire homme, naître du Saint-Esprit et de la Vierge Marie.

5. Semblera-t-il peu de chose que pour des hommes ; pour des pécheurs, pour des coupables, pour des captifs et pour des esclaves ; Dieu même, le Juste, l’Innocent, le Roi suprême, le Maître souverain, soit venu parmi nous revêtu d’un corps humain, se soit montré sur la terre et ait vécu parmi les mortels ? Mais, de plus, il a été crucifié, il est mort et a été enseveli. Ne le crois-tu pas ? Demandes-tu à quelle époque ? Le voici : c’est sous Ponce-Pilate. Pour écarter de toi tout doute, au sujet même de l’époque, on a eu soin de te faire connaître dans ce Symbole le nom propre du juge. Crois donc bien que sous Ponce-Pilate : le Fils de Dieu a été crucifié et enseveli. « Il n’y a point, dit-il, de charité plus grande que de donner sa vie pour ses amis[2] ». Est-ce absolument vrai ? Ne peut-on rien de plus ? Non, Jésus-Christ l’a dit. Toutefois, interrogeons l’Apôtre, il ne dédaignera point de nous répondre à son tour. « Le Christ, dit-il, est mort pour les impies ». Il ajoute : « Que nous étions ses ennemis, nous avons été conciliés avec Dieu par la mort de son Fils ». N’est-ce point dans le Christ une charité plus grande, attendu qu’il a donné sa vie, non pour des amis, mais pour ses ennemis ? Quel n’est donc pas l’amour, quel n’est pas l’attachement de Dieu pour les hommes, puisqu’il affectionne les pécheurs jusqu’à mourir pour eux ! « Ce qui montre sa charité envers nous, dit aussi l’Apôtre, c’est que dans le temps où nous étions encore pécheurs, le Christ est mort pour nous[3] ». Crois-le aussi ; toi, et pour assurer ton salut ne rougis pas de le confesser : « car on croit de cœur pour être justifié, et on confesse de bouche pour être sauvé[4] » Aussi, pour éloigner de toi l’hésitation et la confusion, dès que tu as commencé à croire as reçu

  1. Luc. 1, 34-48
  2. Jn. 15, 13
  3. Rom. 5, 6, 10, 8
  4. Id. 10, 10