Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome X.djvu/423

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rien. Pour celui qui marche dans sa miséricorde et dans son amour, alors même qu’il est délivré des péchés graves et mortels, comme les crimes énormes, les homicides, les vols, les adultères, il rend hommage à la vérité en confessant les fautes légères qu’il a commises dans ses conversations, dans ses pensées, dans l’usage immodéré des choses permises. Aussi vient-il à la lumière par la pratique des bonnes œuvres ; car, en se multipliant, les petits péchés donnent la mort à l’âme, si on n’y prend garde. Ce sont de petites gouttes d’eau qui alimentent le cours des rivières, les grains de sable sont presque perceptibles ; néanmoins, si vous en mettez une grande quantité sur les épaules d’un homme, ils le surchargent et l’écrasent. Ce que fait la violence des flots, l’eau qui s’infiltre dans la sentine peut le faire aussi, quand on n’y porte pas remède ; elle s’y introduit petit à petit ; à force de s’y accumuler, sans jamais en sortir, elle finit par entraîner le navire dans l’abîme. Qu’est-ce que vicier la sentine, sinon empêcher par les bonnes œuvres, les gémissements, les jeûnes, les aumônes, le pardon des injures, que nos péchés nous entraînent dans le précipice ? Le chemin de cette vie est difficile, il est hérissé d’obstacles. La prospérité peut y donner de l’orgueil, le malheur peut nous y abattre. Celui qui t’a départi les joies de la vie présente, le fait pour te consoler, et non pour te donner l’occasion de te corrompre. Par la même raison, celui qui te châtie en ce monde, le fait pour te corriger, et non pour te punir. Accepte les leçons de Dieu comme celles d’un père, afin qu’un jour il ne te punisse pas comme ton juge. Nous vous disons cela tous les jours, et il faut le dire souvent ; car tout cela est bon et utile pour votre salut.

TREIZIÈME TRAITÉ.

DEPUIS CET ENDROIT DE L’ÉVANGILE : « APRÈS CELA JÉSUS VINT EN JUDÉE AVEC SES DISCIPLES », JUSQU’À « MAIS L’AMI DE L’ÉPOUX, QUI SE TIENT DEBOUT ET QUI L’ÉCOUTE, EST RAVI DE JOIE À CAUSE DE LA VOIX DE L’ÉPOUX ». (Chap. 3,22-29.)

JEAN, TÉMOIN DU CHRIST.

Jusqu’alors Jean avait rendu témoignage au Christ, sans néanmoins affirmer qu’il fut Dieu. Pour le voir sous son enveloppe mortelle, il faut, comme les anges, le contempler des yeux de l’âme, et se servir de son humanité afin de parvenir jusqu’à sa divinité. Jean baptisait donc en Enon : Jésus aussi ; de là, grande discussion entre les disciples de Jean et les Juifs. Loin de se glorifier, le précurseur en prit occasion de s’humilier : Je ne suis pas le Christ, dit-il, je ne suis que l’ami de l’époux et je défends son épouse par la pureté de ma charité et l’unité de ma foi. Les hérétiques, qui pensent avant tout à eux-mêmes, et prêchent la division imitent-ils Jean ? Évidemment non. Ne nous laissons donc séduire ni par leurs paroles, ni par leurs prodiges, et conservons la simplicité de la foi dans l’union de la charité.

1. Comme peuvent se le rappeler ceux l’entre vous qui ont souci de leur profit spirituel, nous suivons un ordre dans la lecture de l’Évangile selon Jean. Eu suivant cet ordre, nous sommes précisément amenés à vous expliquer aujourd’hui ce que vous venez d’entendre. Ce qui a été lu depuis le commencement de l’Évangile jusqu’à la leçon de ce jour, nous l’avons expliqué, vous vous en souvenez, Et quand même vous auriez oublié plusieurs des choses que nous vous avons dites, l’idée du ministère que nous remplissons s’est du moins conservée en vous, Pour ce qui a été dit du baptême de Jean, il se peut que vous n’ayez pas tout retenu, je ne doute pas cependant que vous n’en ayez retenu quelque chose. Vous vous souvenez aussi du motif pour lequel le Saint-Esprit est apparu en forme de colombe ; vous vous rappelez également comment nous avons tranché cette difficulté presque inextricable : qu’est-ce que la colombe a pu faire découvrir