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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome X.djvu/682

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Et les bons peuvent le comprendre ainsi, mais sans aucune inquiétude pour eux-mêmes. Jésus-Christ ne voulait parler que de la présence de son corps. En effet, relativement à sa majesté, à sa providence, à sa grâce invisible et ineffable, s’accomplit ce qu’il a dit lui-même : « Voici que je suis avec vous jusqu’à la consommation des siècles [1] ». Mais quant à la chair que le Verbe a prise, selon laquelle il est né de la Vierge, selon laquelle il a été saisi par les Juifs, attaché au bois de la croix, descendu de l’instrument de son supplice, enveloppé d’un linceul, enfermé dans le tombeau, manifesté à sa résurrection, « vous ne l’aurez pas toujours avec vous ». Pourquoi ? parce que corporellement il ne conversa que quarante jours avec ses disciples, et il monta au ciel où ils le conduisirent sinon du corps, du moins des yeux. Par conséquent, il n’est plus ici, car il est au ciel[2] ; il y est assis à la droite du Père ; il est ici en même temps, car sa majesté n’a pas cessé de se trouver présente. En d’autres termes, par rapport à sa divinité, nous ».vous toujours Jésus-Christ avec nous ; mais quant à sa présence corporelle, c’est avec raison qu’il a dit à ses disciples : « Vous ne m’aurez pas toujours ». L’Église n’a joui de sa présence charnelle que l’espace de peu de jours ; maintenant elle le possède par la foi, sans le voir des yeux du corps. Donc, que ces paroles : « Vous ne m’aurez pas toujours », doivent s’entendre dans ce sens ou dans un autre, la question ne me semble plus difficile à résoudre, puisqu’on peut la faire de deux manières.


14. Ecoutons le peu qui nous reste. « Une grande multitude de Juifs apprit donc qu’il était là, et ils y vinrent, non pas seulement à cause de Jésus, mais aussi pour voir Lazare qu’il avait ressuscité ». Ce fut la curiosité qui les amena, et non la charité ; ils vinrent et ils virent. Mais admirez la résolution que leur inspira leur vanité : Ils virent Lazare ressuscité, et comme ce grand miracle du Seigneur avait été publié avec une évidence manifeste, comme le bruit s’en était répandu partout ; comme d’ailleurs ils ne pouvaient ni le cacher ni le nier, voici ce qu’ils imaginèrent. « Cependant les Princes des Prêtres pensèrent à faire mourir aussi Lazare, parce que beaucoup s’éloignaient des Juifs à cause de lui et croyaient en Jésus ». O folle imagination, ô aveugle cruauté ! Le Seigneur Jésus-Christ, qui avait pu ressusciter cet homme mort de maladie, ne pouvait-il pas le ressusciter quand ils l’auraient tué ? En donnant la mort à Lazare, enleviez-vous au Seigneur sa puissance ? Si, pour vous, autre chose est un homme mort, autre chose un homme tué, le Seigneur a ressuscité l’un et l’autre ; il a ressuscité Lazare qui était mort, il s’est ressuscité lui-même après avoir été tué par les Juifs.

  1. Mt. 28, 20
  2. Act. 1, 3, 9-10