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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome XI.djvu/302

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le Sauveur, dans sa Passion, abaissa sur lui son regard, et « il pleura amèrement[1] ». Afin donc de se réintégrer dans sa profession de foi, il dut formuler une protestation de cet amour qu’il avait perdu par crainte. C’est ainsi, mes frères, que le bienheureux Pierre confesse ouvertement Celui qu’il avait nié par crainte devant une servante, et celui qui, en présence d’une femme, avait nié sa propre vie, accepta plus tard, pour Jésus-Christ, la mort sur la croix et mérita la palme du martyre. Qu’il reste donc en communion avec Pierre, celui qui veut avoir part à l’héritage de Jésus-Christ, de qui nous vient toute bénédiction.

VINGT-QUATRIÈME SERMON.

SUR LA FÊTE DE PÂQUES.

(QUATRIÈME SERMON.)



ANALYSE. — 1. Jésus-Christ est sorti du sein de Marie comme il pénètre au milieu des Apôtres, les portes fermées. — 2. La conduite même de ses ennemis est une excellente preuve de sa résurrection. — 3. La résurrection est également prouvée par le témoignage de l’Ange. — 4. Apparition du Sauveur à Marie-Madeleine.

1. « Le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous[2] ». « Le Verbe s’est fait chair », et comment s’est-il fait chair ? Nous l’ignorons. Dieu nous atteste cette vérité, mais elle est pour nous un mystère. Je sais que « le Verbe s’est fait chair », et j’ignore comment il s’est fait chair. Vous vous étonnez de cette ignorance ? Elle est le partage de toute créature. « Car le mystère qui a été caché dans tous les siècles a été révélé dans notre siècle[3] ». Quelqu’un me dira peut-être : Puisque ce mystère a été révélé, comment pouvez-vous dire encore que vous l’ignorez ? Dieu nous a révélé ce qui a été fait, mais le comment reste pour nous un mystère. Isaïe s’écriait : « Qui racontera sa génération[4] ? » Et cependant lui-même avait dit précédemment : « Voici qu’une vierge concevra dans son sein et enfantera[5] ». Ces dernières paroles nous attestent ce qui a été fait, tandis que les premières : « Qui racontera sa génération ? » nous prouvent que si nous savons qu’il est né, nous ne savons pas comment il est né. La sainte et bienheureuse Marie est à la fois mère et vierge, vierge avant l’enfantement, vierge après l’enfantement. Je me demande avec étonnement comment un enfant vierge a pu naître d’une vierge, et comment, après avoir enfanté, cette mère a pu rester vierge. Vous voulez savoir comment Jésus est né d’une vierge et comment, après lui avoir donné naissance, sa mère est restée vierge ? Les portes étaient fermées et Jésus est entré. Personne ne doute que les portes n’aient été fermées ; et celui qui est entré, les portes étant fermées, n’était pas un fantôme, n’était pas un esprit, c’était un corps véritable. Que dit-il, en effet ? « Regardez et voyez qu’un esprit n’a ni chair ni os, comme vous voyez que j’en ai[6] ». Il avait la chair, il avait les os, et les portes étaient fermées. Comment, les portes étant fermées, de la chair et des os sont-ils entrés ? Les portes sont fermées et il entre ; nous le voyons entré, mais comment est-il entré ? Toutes les portes sont fermées, aucun lieu ne lui fournit d’entrée, on ne voit point par où il est entré, et cependant il est entré ; car le voilà dans l’intérieur de la salle, au milieu de ses disciples. Vous ne savez pas comment il est entré, et sur ce comment vous

  1. Lc. 22, 62
  2. Jn. 1, 11
  3. Col. 1,19
  4. Isa. 53, 8
  5. Id. 7, 11
  6. Lc. 24, 39