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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome XI.djvu/301

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VINGT-TROISIÈME SERMON.
SUR LA FÊTE DE PÂQUES.
(TROISIÈME SERMON.)

ANALYSE. — 1. Le corps de Jésus-Christ est dans le tombeau, et son âme est descendue dans les limbes. — 2. Résurrection de Jésus-Christ. — 3. Protestation de saint Pierre en réparation de son renoncement.

1. « Notre Dieu, roi avant tous les siècles, a opéré notre salut au milieu de la terre[1] ». En Jésus-Christ l’homme souffrait, mais la divinité agissait. L’homme a pu goûter les douleurs de la Passion ; mais quelle atteinte pouvait être portée à la puissance divine ? Dans le divin Crucifié nous trouvons la chair, le sang et l’âme qui était la vie de son corps, et comme son âme n’a pu mourir, son corps seul a été déposé dans le tombeau. De son côté, cette âme toujours unie à la Divinité prenait possession du fruit de sa victoire et tirait les élus des limbes où ils étaient renfermés. La divinité en Jésus-Christ pouvait-elle mourir quand son âme elle-même bravait les atteintes de la mort ? Aucune souillure ne l’avait infectée ; elle souffrit, il est vrai, puisqu’elle appartenait à l’humanité du Sauveur, mais en même temps elle partagea les gloires de la divinité. La mort atteignit le corps de Jésus-Christ ; mais sa divinité, triomphant du trépas, se couronna des dépouilles de la mort et les transporta glorieuses dans les cieux. À son approche les vertus célestes interpellent les princes de la mort en ces termes : « Princes, élevez vos portes, et vous, portes éternelles, élevez-vous, et le Roi de gloire entrera[2] ». Le Seigneur Jésus fait briller la lumière de la vérité aux yeux de ceux qui sont assis dans les ténèbres et à l’ombre de la mort, et leur annonce la délivrance. À la vue de leur triomphateur rayonnant de tant de gloire, les auteurs de la mort s’écrient d’une voix craintive : « Quel est ce roi de gloire ? » Et ils reçoivent cette réponse : « C’est le Seigneur fort et puissant, c’est le Seigneur puissant dans la guerre[3] ». O guerre enfin terminée ! Guerre sur la terre, guerre dans les enfers ! Par son innocence Jésus-Christ a vaincu le siècle, et par sa mort il a vaincu la mort.

2. « Voici que le lion de la tribu de Juda a vaincu[4] » ; il a délivré ceux que le démon retenait captifs et en revenant des limbes il emmenait avec lui le butin qu’il avait fait sur la mort. Tel est Celui qui « n’ayant ni forme ni beauté[5] » a montré dans sa résurrection non-seulement de la beauté, mais de la force ; il paraissait faible dans la lutte, mais il se montra fort dans le succès ; il paraissait méprisable dans son corps humilié, mais il se montra puissant dans le combat ; la mort le couvrit de honte, mais la résurrection l’inonda de splendeur ; il sortit du sein de sa Mère dans toute la blancheur de l’innocence, et sur la croix il parut tout couvert de son sang ; dans les opprobres il parut anéanti, au ciel il brille d’un éclat incomparable. Mes frères, glorifions donc le Seigneur « qui a, jusqu’à ce point, aimé le monde[6] », qu’il n’a pas craint de verser pour lui tout son sang. Il est ressuscité, chaque jour cette résurrection nous est attestée par le témoignage des évangélistes. Il est sorti glorieux du tombeau, et « voici qu’il est avec nous, tous les jours, jusqu’à la consommation des siècles[7] ».

3. L’Évangile vient de vous apprendre également que le Sauveur a confié au bienheureux Pierre la conduite de son troupeau : Pais mes brebis avec discipline. Pierre, qui avait renié trois fois par crainte est interrogé trois fois sur son amour. Pour expier sa faute, il avait déjà versé d’abondantes larmes quand

  1. Psa. 72, 12
  2. Psa. 23, 6
  3. Id. 8
  4. Apoc. 5, 5
  5. Isa. 53, 2
  6. Jn. 3, 16
  7. Mt. 28, 20