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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome XI.djvu/305

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en pleurant à l’entrée du sépulcre, et parce que Dieu ne refuse jamais rien à ceux qui le cherchent, « elle s’inclina en pleurant vers le tombeau, et elle vit deux anges vêtus de blanc et assis l’un à la tête et l’autre au pied du sépulcre dans lequel Jésus avait été déposé. Les anges lui disent : Femme, pourquoi pleurez-vous ? ou qui cherchez-vous[1] ? » Madeleine répondit : Je cherche mon Maître, mon Sauveur ; il m’a beaucoup gratifiée, car il m’a délivrée de sept esprits impurs. Malheureuse esclave, j’étais conduite où je ne voulais pas, mais à l’arrivée du Sauveur les chaînes de mes péchés furent rompues et je méritai de suivre Celui que je ne méritais pas. « Maintenant ils ont enlevé mon Seigneur, et je ne sais où ils l’ont placé ». Ô femme, les Apôtres n’ont pu voir les anges, parce qu’ils ont douté ; vous les avez vus parce que vous avez cru. Mais à votre tour vous avez commencé à douter. Et, qui donc pouvait enlever le Seigneur, s’il n’avait voulu ressusciter le troisième jour, comme il l’avait promis ?
4. « S’étant retournée, elle vit le Seigneur debout[2] ». Voilà, mes frères, ce que peuvent l’amour de Dieu et la foi ; Dieu se laisse vaincre par les larmes et par l’humilité. Si Madeleine ne s’était pas inclinée en pleurant, elle, n’aurait pas vu les anges ; si elle ne s’était pas retournée, elle n’aurait pas mérité de voir le Seigneur. « Jésus lui dit : Marie, pourquoi pleurez-vous ? qui cherchez-vous[3]? » Madeleine, ouvrant les yeux, le reconnut et s’écria : Seigneur, vous êtes mon Roi et mon Dieu. Abstenez-vous de me toucher, lui dit Jésus, car je ne suis pas encore monté à mon Père. Madeleine reprit : « Mon Seigneur et mon Dieu[4] ». Vous vous montrez à moi, que me reste-t-il à désirer ?




VINGT-SIXIÈME SERMON.

SUR LA FÊTE DE PÂQUES.

(SIXIÈME SERMON.)



ANALYSE. — 1. La foi comparée à un parfum odoriférant. — 2. Jésus-Christ est le véritable parfum reçu par l’Église. — 3. Ce parfum n’a rien qui déplaise, car c’est le parfum de la piété. — 4. C’est aussi le parfum de la charité. — 5. C’est le parfum de la vertu, de l’obéissance et de l’espérance. — 6. Le nouvel Adam a réparé le crime du premier Adam. — 7. Jésus-Christ triomphe de l’enfer. — 8. Jésus-Christ rédempteur et médecin des âmes. — 9. Puisque l’arrêt de notre condamnation est déchiré, rendons-nous les serviteurs fidèles de Jésus-Christ. — 10. Nous devons ressusciter avec Jésus-Christ.

1. Le jour de la résurrection du Seigneur, la joie des fidèles doit en quelque sorte ressusciter et se renouveler ; laissons donc notre esprit se pénétrer de l’allégresse de ce jour, afin que par une foi vive nous placions en nous le règne de Dieu auquel nous sommes appelés avec Jésus-Christ et par Jésus-Christ. Ces joies chrétiennes ne sont pas de celles qui s’usent par la jouissance ; la jouissance, au contraire, nous enflamme pour la vertu. Qu’on est heureux de se réjouir en Jésus-Christ ! Je crois donc pouvoir comparer la foi aux parfums d’agréable odeur. Tel est ce parfum dont se sentait pénétré le Prophète, quand il s’écriait : « Vous avez plongé ma tête dans l’huile[5] ». Tel est le parfum dont il est dit aux pieux fidèles : « Oignez vos têtes[6] ». Tel est le parfum que les vierges sages portent avec elles pour entretenir le feu de leurs lampes. Tel est le parfum dont il est écrit : « Le parfum qui descend de la tête sur la barbe[7] », laquelle est le signe de l’âge parfait de l’homme, comme le parfum semble indiquer que la

  1. Jn. 20, 11,13
  2. Jn. 20, 14
  3. Id. 15
  4. Ibid
  5. Ps. 22, 5
  6. Mt. 7, 17
  7. Ps. 132, 2